Page:Volney - Les Ruines, 1826.djvu/100

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et la culture s’est amoindrie. Dépourvu d’avances, le laboureur n’a pu ensemencer : l’impôt est survenu, il n’a pu payer ; on l’a menacé du bâton, il a emprunté ; le numéraire, faute de sureté, s’est trouvé caché ; l’intérêt a été énorme, et l’usure du riche a aggravé la misère de l’ouvrier. Et des accidens de saison, des sécheresses excessives ayant fait avorter les récoltes, le gouvernement n’a fait pour l’impôt ni délai ni grace : et la détresse s’appesantissant sur un village, une partie de ses habitans a fui dans les villes, et leur charge, reversée sur ceux qui ont demeuré, a consommé leur ruine, et le pays s’est dépeuplé. Et il est arrivé que, poussés à bout par la tyrannie et l’outrage, des villages se sont révoltés ; et le pacha s’en est réjoui : il leur a fait la guerre, il a pris d’assaut leurs maisons, pillé leurs meubles, enlevé leurs animaux ; et quand la terre a deeuré déserte, que m’importe, a-t-il dit ? je m’en vais demain ! Et la terre manquant de bras, les eaux du ciel ou des torrens débordés ont séjourné en marécages ; et, sous ce climat chaud, leurs


exhalaisons putrides ont causé des épidémies, des pestes, des maladies de toutes espèces : et il s’en est suivi un surcroît de dépopulation, de pénurie et de ruine. ô qui dénombrera tous les maux de ce régime tyrannique