Page:Volney - Les Ruines, 1826.djvu/109

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devenues plus vastes dans leurs masses, elles ont été moins meurtrières dans leurs détails : si les peuples y ont porté moins de personnalité, moins d’énergie, leur lutte a été moins sanguinaire, moins acharnée ; ils ont été moins libres, mais moins turbulens ; plus amollis, mais plus pacifiques. Le despotisme même les a servis ; car si les gouvernemens ont été plus absolus, ils ont été moins inquiets et moins orageux ; si les trônes ont été des propriétés, ils ont excité à titre d’héritage, moins de dissentions, et les peuples ont eu moins de secousses ; si enfin les despotes, jaloux et mystérieux, ont interdit toute connaissance de leur administration, toute concurrence au maniement des affaires, les passions, écartées de la carrière politique, se sont portées vers les arts, les sciences naturelles ; et la sphère des idées en tout genre s’est agrandie ; l’homme, livré aux études abstraites, a mieux saisi sa place dans la nature, ses rapports dans la société ; les principes ont été mieux discutés, les


fins mieux connues, les lumières plus répandues, les individus plus instruits, les mœurs plus sociales, la vie plus douce ; en masse, l’espèce, surtout dans certaines contrées, a sensiblement gagné ; et cette amélioration, désormais ne peut que s’accroître, parce que ses deux principaux obstacles, ceux-là même qui l’avaient rendue jusque-là si lente et quelquefois rétrograde, la difficulté de transmettre et de communiquer rapidement les idées, sont enfin levés. En effet, chez les anciens peuples, chaque