Page:Voltaire - Œuvres complètes, Beuchot, Tome 33, 1829.djvu/313

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changé le leur ? Oh ! dit Candide, il y a bien de la différence, car le libre arbitre…. En raisonnant ainsi, ils arrivèrent à Bordeaux.


Ce qui arriva en France à Candide et à Martin.[1]

Candide ne s’arrêta dans Bordeaux qu’autant de temps qu’il en fallait pour vendre quelques cailloux du Dorado, et pour s’accommoder d’une bonne chaise à deux places ; car il ne pouvait plus se passer de son philosophe Martin ; il fut seulement très fâché de se séparer de son mouton, qu’il laissa à l’académie des sciences de Bordeaux, laquelle proposa pour le sujet du prix de cette année de trouver pourquoi la laine de ce mouton était rouge ; et le prix fut adjugé à un savant du Nord, qui démontra par A, plus B, moins C divisé par Z, que le mouton devait être rouge, et mourir de la clavelée[2].


Cependant tous les voyageurs que Candide rencontra

  1. Ce chapitre XXII a été beaucoup augmenté en 1761 ; voyez ma note, plus en bas. B.
  2. Quelques progrès que les sciences aient faits, il est impossible que, sur dix mille hommes qui les cultivent en Europe, et sur trois cents académies qui y sont établies, il ne se trouve point quelque académie qui propose des prix ridicules, et quelques savants qui fassent d’étranges applications des sciences les plus utiles. Ce ridicule avait frappé M. de Voltaire dans son séjour à Berlin. Les savants du Nord conservaient encore à cette époque quelques restes de l’ancienne barbarie scolastique ; et la philosophie hardie, mais hypothétique et absurde de Leibnitz, n’avait pas contribué à les en dépouiller. K.