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HISTOIRE POSTHUME

Vous me feriez encore un grand plaisir de me faire avoir de Cramer non-seulement l’édition la plus complète de ses œuvres, mais encore jusqu’au dernier des pamphlets sortis de sa plume.


XV.


LETTRE DE CATHERINE II


AU BARON GRIMM[1].


À Tsarsko-Sélo, ce 11 d’août 1778.


Depuis que Voltaire est mort, il me semble qu’il n’y a plus d’honneur attaché à la belle humeur : c’était lui qui était la divinité de la gaieté ; faites-moi donc avoir une édition ou plutôt un exemplaire bien, bien complet de ses œuvres pour renouveler chez moi et corroborer ma disposition naturelle au rire, car, si nous ne m’enverrez pas cela au plus tôt. je ne vous enverrai plus que des élégies.


XVI.


LETTRE DE CATHERINE II


AU BARON GRIMM[2].


À Saint-Pétersbourg, ce 1er d’octobre 1778.


Il y a très-longtemps que dans mes actions je ne prends plus garde à deux choses et qu’elles n’entrent en rien en ligne de compte dans tout ce que je fais : la première, c’est la reconnaissance des hommes ; la seconde, l’histoire. Je fais le bien pour faire le bien, et puis c’est tout ; voilà ce qui m’a relevée du découragement et de l’indifférence pour les choses de ce monde, que je me suis sentis à la nouvelle de la mort de Voltaire. Au reste, c’est mon maître ; c’est lui ou plutôt ses œuvres qui ont formé mon esprit et ma tête. Je vous l’ai dit plus d’une fois, je pense : je suis son écolière ; plus jeune, j’aimais à lui plaire ; une action faite, il fallait pour qu’elle me plût qu’elle fût digne de lui être dite, et tout de suite il en était informé ; il y était si bien accoutumé qu’il me grondait lorsque je le laissais manquer de nouvelles et qu’il les apprenait d’autre part. Mon exactitude sur ce point s’est ralentie les dernières années par la rapidité des événements qui précédèrent et succédèrent à la paix, et par le travail immense que j’ai entrepris j’ai perdu la coutume d’écrire des lettres, et je me sens moins de disposition et de facilité à en écrire.....

  1. Correspondance publiée par la Société impériale de l’Histoire de Russie.
  2. Ibid.