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Si quelqu’un d’un emploi veut être revêtu,
Il n’amènera plus deux témoins à sa suite[1]
Jurer quelle est sa foi, mais quelle est sa conduite.
À l’attrayante sœur d’un gros bénéficier
Un amant huguenot pourra se marier ;
Des trésors de Lorette, amassés pour Marie,
On verra l’indigence habillée et nourrie ;
Les enfants de Sara, que nous traitons de chiens,
Mangeront du jambon fumé par des chrétiens.
Le Turc, sans s’informer si l’iman lui pardonne,
Chez l’abbé Tamponet ira boire en Sorbonne[2].
Mes neveux souperont sans rancune et gaîment
Avec les héritiers des frères Pompignan ;
Ils pourront pardonner à ce dur[3] La Blétrie[4]
D’avoir coupé trop tôt la trame de ma vie.
Entre les beaux esprits on verra l’union :
Mais qui pourra jamais souper avec Fréron ?




ÉPÎTRE CV.


À MONSIEUR DE SAINT-LAMBERT[5].


(1769)


Chantre des vrais plaisirs, harmonieux émule
Du pasteur de Mantoue et du tendre Tibulle,

  1. En France, pour être reçu procureur, notaire, greffier, il faut deux témoins qui déposent de la catholicité du récipiendaire. (Note de Voltaire, 1769.)
  2. Tamponet était en effet docteur de Sorbonne. (Id., 1771.)
  3. Je prends cette version dans la lettre de Voltaire, du 27 mars 1769. Jusqu’à ce jour on avait imprimé :
    Ils pourront pardonner au pincé La Blétrie. (B.)
  4. La Bletterie, à ce qu’on m’a rapporté, a imprimé que j’avais oublié de me faire enterrer. (Note de Voltaire, 1769.)
  5. Cette épître à Saint-Lambert est imprimée dans le Journal encyclopédique de 1769, tome VIII, page 436 ; et dans l’Évangile du jour, tome VI.

    Voltaire, en 1771, dans la cinquième partie des Questions sur l’Encyclopédie, reproduisit cette pièce sous le titre de : « Églogue à M. de Saint-Lambert, auteur du poëme des quatre Saisons. » (B.)