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CHAPITRE XXXVI.

Octavien Sporco, fut élu pape à l’âge de dix-huit ans par le crédit de sa famille. Il prit le nom de Jean XII, en mémoire de Jean XI, son oncle. C’est le premier pape qui ait changé son nom à son avènement au pontificat. Il n’était point dans les ordres quand sa famille le fit pontife. Ce Jean était patrice de Rome, et, ayant la même dignité qu’avait eue Charlemagne, il réunissait par le siège pontifical les droits des deux puissances et le pouvoir le plus légitime ; mais il était jeune, livré à la débauche, et n’était pas d’ailleurs un puissant prince.

On s’étonne que sous tant de papes si scandaleux et si peu puissants l’Église romaine ne perdît ni ses prérogatives, ni ses prétentions ; mais alors presque toutes les autres Églises étaient ainsi gouvernées. Le clergé d’Italie pouvait mépriser de tels papes, mais il respectait la papauté d’autant plus qu’il y aspirait ; enfin, dans l’opinion des hommes, la place était sacrée, quand la personne était odieuse.

Pendant que Rome et l’Église étaient ainsi déchirées, Bérenger, qu’on appelle le Jeune, disputait l’Italie à Hugues d’Arles. Les Italiens, comme le dit Luitprand, contemporain, voulaient toujours avoir deux maîtres pour n’en avoir réellement aucun : fausse et malheureuse politique qui les faisait changer de tyrans et de malheurs. Tel était l’état déplorable de ce beau pays, lorsque Othon le Grand y fut appelé par les plaintes de presque toutes les villes, et même par ce jeune pape Jean XII, réduit à faire venir les Allemands, qu’il ne pouvait souffrir.

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CHAPITRE XXXVI.


Suite de l’empire d’Othon, et de l’état de l’Italie.


(961, 962) Othon entra en Italie, et il s’y conduisit comme Charlemagne : il vainquit Bérenger, qui en affectait la souveraineté. Il se fit sacrer et couronner empereur des Romains par les mains du pape, prit le nom de César et d’Auguste, et obligea le pape à lui faire serment de fidélité, sur le tombeau dans lequel on dit que repose le corps de saint Pierre. On dressa un instrument authentique de cet acte. Le clergé et la noblesse romaine se