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ANNALES DE L’EMPIRE.

de paramont, droit de suzeraineté, droit de relief. On a ensuite, uniquement par ignorance des termes, appliqué cette expression de supériorité territoriale à la possession des domaines mêmes qui relèvent de l’empire, ce qui est au contraire une infériorité territoriale.

Les ducs de Lorraine, de Brabant, de Hainaut, avaient fait hommage de leurs terres aux derniers rois d’Allemagne. Lothaire, roi de France, fait revivre ses prétentions sur ces pays. L’autorité royale prenait alors un peu de vigueur en France, et Lothaire profitait de ces moments pour attaquer à la fois la haute et la basse Lorraine.

978. Othon assemble près de soixante mille hommes, désole toute la Champagne, et va jusqu’à Paris. On ne savait alors ni fortifier les frontières, ni faire la guerre dans le plat pays. Les expéditions militaires n’étaient que des ravages.

Othon est battu, à son retour, au passage de la rivière d’Aisne, Geoffroi, comte d’Anjou, surnommé Grisegonelle, le poursuit sans relâche dans la forêt des Ardennes, et lui propose, selon les règles de la chevalerie, de vider la querelle par un duel. L’empereur refusa le défi, soit qu’il crût sa dignité au-dessus d’un combat avec Grisegonelle, soit qu’étant cruel il ne fût point courageux.

979. L’empereur et le roi de France font la paix, et par cette paix, Charles, frère de Lothaire, reçoit la basse Lorraine de l’empereur, avec quelque partie de la haute. Il lui fait hommage à genoux ; et c’est, dit-on, ce qui a coûté le royaume de France à sa race ; du moins Hugues Capet se servit de ce prétexte pour le rendre odieux.

Pendant qu’Othon II s’affermissait en Allemagne, les Romains avaient voulu soustraire l’Italie au joug allemand. Un nommé Censius[1] s’était fait déclarer consul. Lui et son parti avaient fait un pape qui s’appelait Boniface VII. Un comte de Toscanelle, ennemi de sa faction, avait fait un autre pape, et Boniface VII était allé à Constantinople inviter les empereurs grecs, Basile et Constantin, à venir reprendre Rome. Les empereurs grecs n’étaient pas assez puissants. Le pape leur joignit les Arabes d’Afrique, aimant mieux rendre Rome mahométane qu’allemande. Les chrétiens grecs et les musulmans africains unissent leurs flottes, et s’emparent ainsi du pays de Naples.

Othon II passe en Italie, et marche à Rome.

  1. Voltaire a dit Crescence ci-dessus, page 197 ; et Crescentius, tome XI, page 344.