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FRÉDÉRIC II.

dit Innocent IV, Frédéric convaincu de sacrilége et d’hérésie, excommunié, et déchu de l’empire. J’ordonne aux électeurs d’élire un autre empereur, et je me réserve la disposition du royaume de Sicile. »

Après avoir prononcé cet arrêt, il entonne un Te Deum, comme on fait aujourd’hui après une victoire.

L’empereur était à Turin, qui appartenait alors au marquis de Suze. Il se fait donner la couronne impériale (les empereurs la portaient toujours avec eux), et, la mettant sur sa tête : « Le pape, dit-il, ne me l’a pas encore ravie ; et avant qu’on me l’ôte, il y aura bien du sang répandu. » Il envoie à tous les princes chrétiens une lettre circulaire. « Je ne suis pas le premier, dit-il, que le clergé ait aussi indignement traité, et je ne serai pas le dernier. Vous en êtes la cause, en obéissant à ces hypocrites dont vous connaissez l’ambition effrénée. Combien ne découvririez-vous pas d’infamies à Rome, qui font frémir la nature, etc. ! »

1246. Le pape écrit au duc d’Autriche, chassé de ses États, aux ducs de Saxe, de Bavière, et de Brabant, aux archevêques de Cologne, de Trêves, et de Mayence, aux évêques de Strasbourg et de Spire, et leur ordonne d’élire pour empereur Henri, landgrave de Thuringe.

Les ducs refusent de se trouver à la diète indiquée à Vurtzbourg, et les évêques couronnent leur Thuringien, qu’on appelle le roi des prêtres.

Il y a ici deux choses importantes à remarquer : la première, qu’il est évident que les électeurs n’étaient pas au nombre de sept ; la seconde, que Conrad, fils de l’empereur, roi des Romains, était compris dans l’excommunication de son père, et déchu de tous ses droits comme un hérétique, selon la loi des papes et selon celle de son propre père, qu’il avait publiée quand il voulait plaire aux papes[1].

Conrad soutient la cause de son père et la sienne. Il donne bataille au roi des prêtres près de Francfort ; mais il a du désavantage.

Le landgrave de Thuringe, ou l’anti-empereur, meurt en assiégeant Ulm ; mais le schisme impérial ne finit pas.

C’est apparemment cette année que Frédéric II, n’ayant que trop d’ennemis, se réconcilia avec le duc d’Autriche, et que, pour se l’attacher, il lui donna, à lui et à ses descendants, le titre de roi, par un diplôme conservé à Vienne : ce diplôme est sans date. Il

  1. Voyez année 1220.