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ANNALES DE L’EMPIRE.

Voilà quel fruit Louis XII retire de sa ligue de Cambrai et de tant d’argent donné à l’empereur.

Jules II, qui voulait cacciare i barbari d’Italia, y introduit donc à la fois des Aragonais, des Suisses, des Allemands.

Gaston de Foix, neveu de Louis XII, gouverneur de Milan, jeune prince qui acquit la plus grande réputation parce qu’il se soutenait avec très-peu de forces, défait tous les alliés à la bataille de Ravenne ; mais il est tué dans sa victoire (11 avril), et le fruit de la victoire est perdu : ce qui arrive presque toujours aux Français en Italie. Ils perdent le Milanais après cette célèbre journée de Ravenne, qui en d’autres temps eût donné l’empire de l’Italie. Pavie est presque la seule place qui leur reste.

Les Suisses, qui, excités par le pape, avaient servi à cette révolution, reçoivent de lui, au lieu d’argent, le titre de défenseurs du saint-siége.

Maximilien continue cependant la guerre contre les Vénitiens ; mais ces riches républicains se défendent, et réparent chaque jour leurs premières pertes.

Le pape et l’empereur négocient sans cesse. C’est cette année que Maximilien fait proposer à Jules II de l’accepter pour son coadjuteur dans le pontificat. Il ne voyait plus d’autre manière de rétablir l’autorité impériale en Italie. C’est dans cette vue qu’il prenait quelquefois le titre de Pontifex maximus, à l’exemple des empereurs romains. Sa qualité de laïque n’était point une exclusion au pontificat. L’exemple récent d’Amédée de Savoie le justifiait[1]. Le pape s’étant moqué de la proposition de la coadjutorerie, Maximilien songe à lui succéder : il gagne quelques cardinaux ; il veut emprunter de l’argent pour acheter le reste des voix à la mort de Jules, qu’il croit prochaine. Sa fameuse lettre à l’archiduchesse Marguerite sa fille en est un témoignage subsistant encore en original.

L’investiture du duché de Milan, qui trois ans auparavant avait coûté cent soixante mille écus d’or à Louis XII, est donnée à Maximilien Sforce à plus bas prix, au fils de ce Louis le Maure que Louis XII avait retenu dans une prison si rude, mais si juste. Les mêmes Suisses qui avaient trahi Louis le Maure pour Louis XII ramènent le fils en triomphe dans Milan.

1513. Jules II meurt[2] après avoir fondé la véritable grandeur des papes, la temporelle : car, pour l’autre, elle diminuait tous les

  1. Voyez année 1411.
  2. Dans la nuit du 20 au 21 février 1513.