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ANNALES DE L’EMPIRE.

Les États protestants, encouragés, s’assemblent à Leipsick. Ils y résolvent de faire de très-humbles remontrances à Ferdinand, et d’appuyer leur requête de quarante mille hommes pour rétablir la paix dans l’empire. Gustave avance en augmentant toujours son armée. Il est à Francfort-sur-l’Oder ; il ne peut de là empêcher le général Tilly de prendre Magdebourg d’assaut le 20 mai. La ville est réduite en cendres. Les habitants périssent par le fer et par les flammes : événement horrible, mais confondu aujourd’hui dans la foule des calamités de ce temps-là. Tilly, maître de l’Elbe, comptait empêcher le roi de Suède de pénétrer plus avant.

L’empereur, après s’être accommodé enfin avec la France, au sujet du duc de Mantoue, rappelait toutes ses troupes d’Italie. La supériorité était encore tout entière de son côté. L’électeur de Saxe, qui le premier avait appelé Gustave-Adolphe, est alors très-embarrassé ; et l’électeur de Brandebourg, se trouvant précisément entre les armées impériale et suédoise, est très-irrésolu.

Dans cette crise, Gustave force, les armes à la main, l’électeur de Brandebourg à se joindre à lui. L’électeur George-Guillaume lui livre la forteresse de Spandau pour tout le temps de la guerre, lui assure tous les passages, le laissant recruter dans le Brandebourg, et se ménageant auprès de l’empereur la ressource de s’excuser sur la contrainte.

L’électeur de Saxe donne à Gustave ses propres troupes à commander. Le roi de Suède s’avance à Leipsick. Tilly marche au devant de lui et de l’électeur de Saxe à une lieue de la ville. Les deux armées étaient chacune d’environ trente mille combattants. Les troupes de Saxe nouvellement levées ne font aucune résistance, et l’électeur de Saxe est entraîné dans leur fuite. La discipline suédoise répara ce malheur. Gustave commençait à faire de la guerre un art nouveau, il avait accoutumé son armée à un ordre et à des manœuvres qui n’étaient point connus ailleurs ; et quoique Tilly fût regardé comme un des meilleurs généraux de l’Europe, il fut vaincu d’une manière complète ; cette bataille se donna le 27 septembre.

Le vainqueur poursuit les Impériaux dans la Franconie ; tout se soumet à lui depuis l’Elbe jusqu’au Rhin. Toutes les places lui ouvrent leurs portes, pendant que l’électeur de Saxe va jusque dans la Bohême et dans la Silésie. Gustave rétablit tout d’un coup le duc de Mecklenbourg dans ses États à un bout de l’Allemagne ; et il est déjà à l’autre bout, dans le Palatinat, après avoir pris Mayence.