Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome14.djvu/361

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sans cette démarche, leur parlement n’eût point pris de parti entre les maisons de Bourbon et d’Autriche ; mais que reconnaître ainsi pour leur roi un prince proscrit par eux leur parut une injure à la nation, et un despotisme qu’on voulait exercer dans l’Europe. Les instructions données par la ville de Londres à ses représentants furent violentes.

« Le roi de France se donne un vice-roi en conférant le titre de notre souverain à un prétendu prince de Galles. Notre condition serait bien malheureuse si nous devions être gouvernés au gré d’un prince qui a employé le fer, le feu et les galères, pour détruire les protestants de ses États : aurait-il plus d’humanité pour nous que pour ses propres sujets ? »

Guillaume s’expliqua dans le parlement avec la même force. On déclara le nouveau roi Jacques coupable de haute trahison : un bill d’attainder fut porté contre lui, c’est-à-dire qu’il fut condamné à mort comme son grand-père ; et c’est en vertu de ce bill qu’on mit depuis sa tête à prix. Tel était le sort de cette famille infortunée, dont les malheurs n’étaient pas encore épuisés[1]. Il faut avouer que c’était opposer de la barbarie à la générosité du roi de France.

Il paraît très-vraisemblable que l’Angleterre se serait toujours déclarée contre Louis XIV, quand même il eût refusé le vain titre de roi au fils de Jacques II. La monarchie d’Espagne, entre les mains de son petit-fils, semblait devoir armer nécessairement contre lui les puissances maritimes. Quelques membres du parlement gagnés n’auraient pas arrêté le torrent de la nation. C’est un problème à résoudre, si Mme de Maintenon ne pensa pas mieux que tout le conseil, et si Louis XIV n’eut pas raison de laisser agir la hauteur et la sensibilité de son âme.

L’empereur Léopold commença d’abord cette guerre en Italie, dès le printemps de l’année 1701. L’Italie a toujours été le pays le plus cher aux intérêts des empereurs. C’était celui où ses armes pouvaient le plus aisément pénétrer par le Tyrol et par l’État de Venise : car Venise, quoique neutre en apparence, penchait plus cependant pour la maison d’Autriche que pour celle de France. Obligée d’ailleurs, par des traités, de donner passage aux troupes allemandes, elle accomplissait ces traités sans peine.

    Lettres, que Louis XIV reconnut le prétendant par des importunités de femmes. On voit, par ces témoignages, avec quelle exactitude l’auteur du Siècle de Louis XIV, a cherché la vérité, et avec quelle candeur il l’a dite. (Note de Voltaire.)

  1. Voyez page 306.