Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome14.djvu/397

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Chamillart, intimidé par les défaites précédentes, avait fait décider qu’on devait attendre, et non présenter la bataille ; et cet ordre, donné dans Versailles, fut cause que soixante mille hommes furent dispersés. Les Français n’avaient pas eu plus de deux mille hommes tués dans cette bataille ; mais on a déjà vu que le carnage fait moins que la consternation. L’impossibilité de subsister, qui ferait retirer une armée après la victoire, ramena vers le Dauphiné les troupes après la défaite. Tout était si en désordre que le comte de Médavi-Grancei, qui était alors dans le Mantouan avec un corps de troupes (9 septembre 1706), et qui battit à Castiglione les Impériaux commandés par le landgrave de Hesse, depuis roi de Suède[1], ne remporta qu’une victoire inutile, quoique complète. On perdit en peu de temps le Milanais, le Mantouan, le Piémont, et enfin le royaume de Naples.


CHAPITRE XXI.

SUITE DES DISGRÂCES DE LA FRANCE ET DE L’ESPAGNE. LOUIS XIV ENVOIE SON PRINCIPAL MINISTRE DEMANDER EN VAIN LA PAIX. BATAILLE DE MALPLAQUET PERDUE, ETC.


La bataille d’Hochstedt avait coûté à Louis XIV la plus florissante armée, et tout le pays du Danube au Rhin ; elle avait coûté à la maison de Bavière tous ses États. La journée de Ramillies avait fait perdre toute la Flandre jusqu’aux portes de Lille. La déroute de Turin avait chassé les Français d’Italie, ainsi qu’ils l’ont toujours été dans toutes les guerres depuis Charlemagne. Il restait des troupes dans le Milanais, et cette petite armée victorieuse sous le comte de Médavi. On occupait encore quelques places. On proposa de céder tout à l’empereur pourvu qu’il laissât retirer ces troupes, qui montaient à près de quinze mille hommes. L’empereur accepta cette capitulation. Le duc de Savoie y consentit. Ainsi l’empereur, d’un trait de plume, devint le maître paisible en Italie. La conquête du royaume de Naples et de Sicile lui fut assurée. Tout ce qu’on avait regardé en Italie

  1. Sous le nom de Frédéric.