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DESCRIPTION DE LA RUSSIE.


Il n’y avait d’abord dans ce pays que des païens et des mahométans ; ils ont été baptisés chrétiens de la communion romaine quand ils ont servi la Pologne ; et ils sont aujourd’hui baptisés chrétiens de l’Église grecque, depuis qu’ils sont à la Russie.

Parmi eux sont compris ces Cosaques zaporaviens, qui sont à peu près ce qu’étaient nos flibustiers, des brigands courageux. Ce qui les distingue de tous les autres peuples, c’est qu’ils ne souffrent jamais de femmes dans leurs peuplades, comme on prétend que les amazones ne souffraient point d’hommes chez elles. Les femmes qui leur servent à peupler demeurent dans d’autres îles du fleuve ; point de mariage, point de famille : ils enrôlent les enfants mâles dans leurs milices, et laissent les filles à leurs mères. Souvent le frère a des enfants de sa sœur, et le père de sa fille. Point d’autres lois chez eux que les usages établis par les besoins : cependant ils ont quelques prêtres du rite grec. On a construit depuis quelque temps le fort Sainte-Élisabeth, sur le Borysthène, pour les contenir. Ils servent dans les armées comme troupes irrégulières, et malheur à qui tombe dans leurs mains !

DES GOUVERNEMENTS DE BELGOROD, DE VÉRONISE, ET DE NISCHGOROD.

Si vous remontez au nord-est de la province de Kiovie, entre le Borysthène et le Tanaïs, c’est le gouvernement de Belgorod qui se présente : il est aussi grand que celui de Kiovie. C’est une des plus fertiles provinces de la Russie ; c’est elle qui fournit à la Pologne une quantité prodigieuse de ce gros bétail qu’on connaît sous le nom de bœufs de l’Ukraine. Ces deux provinces sont à l’abri des incursions des petits Tartares, par des lignes qui s’étendent du Borysthène au Tanaïs, garnies de forts et de redoutes.

Remontez encore au nord, passez le Tanaïs, vous entrez dans le gouvernement de Véronise, qui s’étend jusqu’aux bords des Palus-Méotides. Auprès de la capitale, que nous nommons Véronise[1], à l’embouchure de la rivière de ce nom, qui se jette dans le Tanaïs, Pierre le Grand a fait construire sa première flotte : entreprise dont on n’avait point encore d’idée dans tous ces vastes États. Vous trouvez ensuite le gouvernement de Nischgorod, fertile en grains, traversé par le Volga.

  1. En Russie, on écrit et on prononce Voronesteh. (Note de Voltaire.)