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DROIT CANONIQUE.


Enfin, ces biens ne viennent de Dieu que comme tous les autres biens en dérivent, parce que tout est soumis à sa Providence.

Ainsi tout ecclésiastique possesseur d’un bien ou d’une rente en jouit comme sujet et citoyen de l’État, sous la protection unique de la loi civile.

Un bien qui est quelque chose de matériel et de temporel ne saurait être sacré ni saint dans aucun sens, ni au propre ni au figuré. Si l’on dit qu’une personne, un édifice, sont sacrés, cela signifie qu’ils sont consacrés, employés à des usages spirituels.

Abuser d’une métaphore pour autoriser des droits et des prétentions destructives de toute société, c’est une entreprise dont l’histoire de la religion fournit plus d’un exemple, et même des exemples bien singuliers qui ne sont pas ici de mon ressort.


SECTION III[1].


Des assemblées ecclésiastiques ou religieuses.


Il est certain qu’aucun corps ne peut former dans l’État aucune assemblée publique et régulière que du consentement du souverain.

Les assemblées religieuses pour le culte doivent être autorisées par le souverain dans l’ordre civil, afin qu’elles soient légitimes.

En Hollande, où le souverain accorde à cet égard la plus grande liberté, de même à peu près qu’en Russie, en Angleterre, en Prusse, ceux qui veulent former une Église doivent en obtenir la permission : dès lors cette Église est dans l’État, quoiqu’elle ne soit pas la religion de l’État. En général, dès qu’il y a un nombre suffisant de personnes ou de familles qui veulent avoir un certain culte et des assemblées, elles peuvent, sans doute, en demander la permission au magistrat souverain, et c’est à ce magistrat à en juger. Ce culte une fois autorisé, on ne peut le troubler sans pécher contre l’ordre public. La facilité que le souverain a eue en Hollande d’accorder ces permissions n’entraîne aucun désordre ; et il en serait ainsi partout si le magistrat seul examinait, jugeait, et protégeait.

Le souverain a le droit en tout temps de savoir ce qui se passe dans les assemblées, de les diriger selon l’ordre public, d’en ré-

  1. Voyez la note de la page 429.