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ÉVANGILE.

incompréhensible l’a rebuté : pourra-t-il dire que l’existence d’un Dieu rémunérateur et vengeur est un mystère incompréhensible ? Enfin, s’il ne s’est pas soumis à la voix d’un évêque catholique qui lui a dit : Voilà Dieu, qu’un homme consacré par moi a mis dans ta bouche, résistera-t-il à la voix de tous les astres et de tous les êtres animés qui lui crient : C’est Dieu qui nous a formés ?


EUPHÉMIE[1].


On trouve ces mots au grand Dictionnaire encyclopédique, à propos du mot Euphémisme : « Les personnes peu instruites croient que les Latins n’avaient pas la délicatesse d’éviter les paroles obscènes. C’est une erreur. »

C’est une vérité assez honteuse pour ces respectables Romains. Il est bien vrai que ni dans le sénat, ni sur les théâtres, on ne prononçait les termes consacrés à la débauche ; mais l’auteur de cet article[2] avait oublié l’épigramme infâme d’Auguste contre Fulvie, et les lettres d’Antoine[3] et les turpitudes affreuses d’Horace, de Catulle, de Martial. Ce qu’il y a de plus étrange, c’est que ces grossièretés, dont nous n’avons jamais approché, se trouvent mêlées dans Horace à des leçons de morale. C’est dans la même page l’école de Platon avec les figures de l’Arétin. Cette Euphémie, cet adoucissement était bien cynique.


ÉVANGILE[4].


C’est une grande question de savoir quels sont les premiers Évangiles. C’est une vérité constante, quoi qu’en dise Abbadie, qu’aucun des premiers Pères de l’Église, inclusivement jusqu’à Irénée, ne cite aucun passage des quatre Évangiles que nous connaissons. Au contraire, les alloges, les théodosiens, rejetèrent constamment l’Évangile de saint Jean, et ils en parlaient toujours

  1. Dans l’édition de Kehl, qui, je crois, la première a donné cet article, il est intitulé Euphémie, et le mot Euphémie est répété dans la seconde ligne ; mais c’est dans l’article Euphémisme de l’Encyclopédie qu’est le passage transcrit par Voltaire. En faisant la correction à la seconde ligne, j’ai pu toutefois conserver l’intitulé tel qu’il est dans l’édition de Kehl. (B.)
  2. Dumarsais.
  3. Voltaire a rapporté l’épigramme d’Auguste et une lettre d’Antoine, dans l’article Auguste Octave, tome XVII, page 484.
  4. Dictionnaire philosophique, édition de 1767. (B.)