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MESSE.

bénédictins, ne reconnaissent pas les frères de la Charité. On ne parle pas seulement d’eux dans la continuation de l’Histoire ecclésiastique de Fleury. Pourquoi ? C’est qu’ils ont fait des cures, et qu’ils n’ont point fait de miracles. Ils ont servi, et ils n’ont point cabalé. Ils ont guéri de pauvres femmes, et ils ne les ont ni dirigé, ni séduites. Enfin leur institut étant la charité, il était juste qu’ils fussent méprisés par les autres moines.

La médecine ayant donc été une profession mercenaire dans le monde, comme l’est en quelques endroits celle de rendre la justice, elle a été sujette à d’étranges abus. Mais est-il rien de plus estimable au monde qu’un médecin qui, ayant dans sa jeunesse étudié la nature, connu les ressorts du corps humain, les maux qui le tourmentent, les remèdes qui peuvent le soulager, exerce son art en s’en défiant, soigne également les pauvres et les riches, ne reçoit d’honoraires qu’à regret, et emploie ces honoraires à secourir l’indigent ? Un tel homme n’est-il pas un peu supérieur au général des capucins, quelque respectable que soit ce général[1] ?



MESSE.


La messe, dans le langage ordinaire, est la plus grande et la plus auguste des cérémonies de l’Église. On lui donne des surnoms différents, selon les rites usités dans les diverses contrées où elle est célébrée, tels que la messe mosarabe ou gothique, la messe grecque, la messe latine. Durandus et Eckius appellent sèche la messe où il ne se fait point de consécration, comme celle qu’on fait dire en particulier aux aspirants à la prêtrise ; et le cardinal Bona[2] rapporte, sur la foi de Guillaume de Nangis, que saint Louis, dans son voyage d’outre-mer, la faisait dire ainsi pour ne pas risquer que l’agitation du vaisseau fît répandre le vin consacré. Il cite aussi Génébrard, qui dit avoir assisté à Turin, en 1587, à une pareille messe célébrée dans une église, mais après dîner et fort tard, pour les funérailles d’une personne noble.

Pierre le chantre parle aussi de la messe à deux, à trois, et même à quatre faces, dans laquelle le prêtre célébrait la messe du jour ou de la fête jusqu’à l’offertoire ; puis il en recommençait une seconde, une troisième, et quelquefois une quatrième, jusqu’au même endroit ; ensuite il disait autant de secrètes qu’il

  1. Voyez l’article Maladie.
  2. I, chapitre xv, sur la liturgie. (Note de Voltaire.)