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DE RAMPONEAU. H9

entre les mains de maître Mannory S célèlire dans l'univers, qui a fait imprimer des plaidoyers lus de l'univers, et l'univers entier jugerait entre Gaudon et Raraponeau.

Je vois d'ici maître Beaumont sourire; je l'entends répéter ces mots d'Horace, ce poëte du Pont-Xeuf que j'ai ouï souvent citer :

Perfidus hic caupo.

(Livre I, sat. 1,29.)

��cauponibus atque malignis.

(Id., I, IV, 4.)

Ce fripon de c ibaretier, ces cabaretiers malins.

Il aura recours même à V Encyclopédie, ouvrage d'un siècle que j'ai entendu nommer de Trajan - : car à quoi n'a-t-on point recours dans une mauvaise cause? L'Encyclopédie, à l'article Cabaret, pré- tend que les lois de la police ne sont pas toujours rigoureusement observées dans nos maisons. Je demande justice à la cour de cette calomnie : je me joins à maître Palissot, maître Lefranc de Pompignan, et maître Fréron, contre ce livre abominable. Je savais déjà parleurs émissaires, mes camarades ou mes pratiques, combien ce livre et leurs semblables sont pernicieux.

Une foule de citoyens de tout ordre et de tout âge les lit, au lieu d'aller au cabaret : les auteurs et les lecteurs passent dans leurs cabinets une vie retirée, qui est la source de tant d'attroupe- ments scandaleux. On étudie la géométrie, la morale, la méta- physique, et l'histoire : de là ces billets de confession qui ont troublé la France, ces convulsions qui l'ont également déshonorée, ces cris contre des contributions nécessaires au soutien de la patrie, tandis que .les comédiens recueillent plus d'argent par jour aux représentations de la pièce charitable contre les Philo- sophes que le souverain n'en retire pour le soutien du royaume. Ces détestables livres enseignent visiblement à couper la bourse et la gorge sur le grand chemin : ce qui certes n'arrive pas à la Courtille, où nous abreuvons les gorges, et vidons les bourses loyalement.

1. Louis Mannory, né à Paris en 1690, mort en 1777, est l'auteur de Plaidoyers et Mémoires, 1759 et années suivantes, dix-huit volumes in-1'2. Après avoir été grand partisan de Voltaire, et avoir écrit en faveur de son OEdipe (voyez tome P' du Théâtre, page 9), il passa dans le rang de ses ennemis; et il est probable- ment l'un des auteurs, c'est-à-dire compilateurs, du Voltariana; voyez, tome XS.IÏ, la note 2 de la page 76.

2. Voyez, tome m du Théâtre, la note de la page 3-A.

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