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MÉLANGES




FRAGMENT
D’UNE LETTRE
SUR LES DICTIONNAIRES SATIRIQUES[1]


(1773)

Un de ces plus étranges dictionnaires de parti, un de ces plus impudents recueils d’erreurs et d’injures par A et par B, est celui d’un nommé Paulian, ex-jésuite, imprimé à Nîmes, chez Gaude, en 1770 ; il est intitulé Dictionnaire philosopho-théologique[2], et il n’est assurément ni d’un philosophe, ni d’un vrai théologien, supposé qu’il y ait de vrais théologiens chez les jésuites.

À l’article Religion, il dit que « quiconque admet la religion naturelle avoue sans peine qu’un Être infiniment parfait a tiré du néant ce vaste univers ».

Remarquez cependant qu’il n’y a jamais eu aucun philosophe, aucun patriarche, aucun homme d’une religion naturelle ou surnaturelle, qui ait enseigné la création du néant. Il faudrait être d’une ignorance bien obstinée pour nier que la Genèse n’a aucun mot qui signifie créer de rien. On sait assez que l’hébreu et le

  1. Les éditeurs de Kehl ont donné à ce morceau la date de 1771 ; il me semble qu’il doit être du même temps que la Réponse qui suit. Or, dans cette Réponse, il est fait mention des Trois Siècles de la littérature, par Sabatier, ouvrage qui ne parut qu’à la fin de novembre 1772. Quelque prompte qu’ait été la plume de Voltaire, on ne peut guère penser que le Fragment et la Réponse soient antérieurs à janvier 1773. Ils peuvent y être postérieurs. La plus ancienne ou première édition que je connaisse de ces morceaux est celle qui fait partie du volume intitulé Lettres chinoises, indiennes, et tartares, etc., 1776 in-8o. En rejetant la date de 1771, je ne donne donc pas comme certaine celle de 1773. (B.)
  2. Voyez l’avertissement de Beuchot en tête du tome XVII.