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SUR L’HISTOIRE GÉNÉRALE.

tinente attribuée à l’abbé Eucher, depuis évêque de Lyon, mort en 454, cent soixante-sept ans après cette aventure. Nous avions fait voir combien il était ridicule d’attribuer à cet évêque une rapsodie dans laquelle il est parlé, avant l’année 454, du roi de Bourgogne Sigismond, qui mourut en 523. Cette ineptie était assez sensible. Nous avions prouvé qu’aucun auteur ne parla jamais d’une légion thébaine. Il y avait trois légions en Égypte ; mais aucune n’était composée d’habitants de Thèbes. Cette prétendue légion n’avait pu arriver d’orient en occident par le Valais, comme on le dit ; elle n’avait pu être entourée de troupes supérieures en nombre qui l’auraient égorgée dans le petit défilé d’Agaune, où l’on ne peut ranger deux cents hommes en bataille, et où la moitié d’une cohorte aurait aisément arrêté toutes les légions de l’empire romain. Ce monstrueux amas de bêtises méritait d’être développé, et il s’est trouvé un Nonotte qui les a défendues comme son bien propre. Il a intitulé son livre nos Erreurs, et il a trouvé des dévotes qui l’ont cru sur sa parole.


ARTICLE VII.


De David, de Constantin, de Théodose, de Charlemagne, etc.


Après les exemples continuels d’injustice, de cruauté, de meurtre, de brigandage, dont l’histoire de presque toutes les nations est surchargée, il nous parut utile et consolant de ne pas canoniser ces crimes chez les princes, de quelque religion qu’ils fussent. David était sans doute un bon Juif ; mais ce n’était pas une chose honnête (humainement parlant) de se révolter contre son souverain[1] ; de se mettre à la tête de quatre cents voleurs ; de rançonner, de piller ses compatriotes ; de trahir à la fois sa patrie et le roitelet Achis, son bienfaiteur ; de massacrer tout dans les villages de ce bienfaiteur[2], jusqu’aux enfants à la mamelle, afin qu’il ne restât personne pour le dire ; de faire cuire dans des fours, de déchirer sous des herses de fer les habitants de Rabath[3] ; de scier le crâne et la poitrine aux autres Amorrhéens ; d’écraser sous des chariots leurs membres palpitants ; de donner sept enfants[4] du roi Saül, son maître, aux Gabaonites, pour les pendre, etc., etc.

  1. I. Livre des Rois, xxii, 2.
  2. Ibid., xxvii, 11.
  3. II. Rois, xii, 31.
  4. Ibid., xxii, 6, 8 et 9.