Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome30.djvu/266

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revinrent point. Ils prétextaient un ordre de Cyrus. Il n’est pas naturel que la chancellerie de Babylone ait ordonné à des Juifs de donner de l’or et de l’argent à d’autres Juifs pour les aider à bâtir.

Voici quelque chose de bien plus fort. Le premier livre d’Esdras raconte qu’on retrouva dans Ecbatane un mémoire dans lequel étaient écrits ces mots [ch, v, v. 13, et vi, v. 3 et 4] : a La première année du règne du roi Cyrus, le roi Cyrus a ordonné que la maison de Dieu, qui est à Jérusalem, fût rebâtie pour y offrir des hosties ; qu’il y eût trois rangs de pierres brutes, et trois rangs de bois, etc. »

Si les Juifs avaient le diplôme de Cyrus donné à Babylone, pourquoi en chercher un autre dans Ecbatane? Que veut dire : la première année du règne de Cyrus? Il régna dans Ecbatane avant de prendre Babylone ; il ne pouvait rien ordonner concernant les Juifs esclaves à Babylone, lorsqu’il n’était que roi des Mèdes. Il y a là une contradiction palpable.

De plus, un roi, soit babylonien, soit hyrcanien, ne s’embarrasse guère si un temple juif sera bâti de trois rangs de pierres de taille ou brutes, et s’il y aura par-dessus ces pierres trois rangs de planches. Enfin ce n’est pas là un temple, c’est une très-pauvre et très-mauvaise grange ; et cette mesquinerie grossière ne s’accorde guère avec les cinq mille quatre cents vases d’or et d’argent que Cyrus, roi de Perse, fit rendre aux Juifs dans le premier chapitre. On voit l’esprit juif dans toutes ces exagérations ; son orgueil perce à travers sa misère : et dans cet orgueil, et dans cette misère, les contradictions se glissent en foule.

Esdras fait rendre à ces malheureux cinq mille quatre cents vases dor et d’argent par Cyrus ; et le moment d’après c’est Artaxerce qui les donne. Or, entre le commencement du règne de Cyrus dans Ecbatane, et celui d’Artaxerce à Babylone, on compte environ six vingts ans. Supputez, lecteurs, et jugez.


ESTHER.


AVIS DU COMMENTATEUR.


Ce livre d’Esther étant reconnu par les Juifs, nous allons en rassembler les traits les plus curieux : et nous les commen-