Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome30.djvu/315

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Christ qui a prêché dans Kapernaüm ; qu’enfin cette application continuelle à détourner le sens des anciens livres juifs est un artifice grossier. C’est ainsi que s’explique une foule d’auteurs nouveaux, qui tous ont marché sur les traces du fameux rabbin Maimonide, et surtout du rabbin Isaac, lequel écrivit son rempart de la foi au commencement du seizieme siecle dans la Mauritanie, imprimé depuis dans le recueil de Wagenzeil[1].

S’il ne s’agissait ici que de disputes entre des scholiastes sur quelque auteur profane, comme Cicéron ou Virgile, il serait permis de prendre le parti qui paraîtrait le plus vraisemblable à la faible raison humaine ; mais c’est un livre sacré ; c’est le fondement de notre religion : notre seul parti est d’adorer et de nous taire.

IX. Καὶ βαπτισθεὶς ὁ Ἰησοῦς ἀνέϐη εὐθὺς ἀπὸ τοῦ ὕδατος· ϰαὶ, ἰδοὺ, ἀνεῴχθησαν αὐτῷ οἱ οὐρανοὶ, ϰαὶ εἶδε τὸ πνεῦμα τοῦ Θεοῦ ϰαταϐαῖνον ὡσεὶ περιστερὰν, ϰαὶ ἐρχόμενον ἐπ’ αὐτόν.

Et Jésus baptisé sortit aussitôt de l’eau ; et voilà que les cieux lui furent ouverts, et qu’il vit le souffle de Dieu descendant comme une colombe, et venant sur lui. (Matth., chap. III, v. 16.)

Et Jésus baptisé sortit aussitôt de l’eau ; et voilà que les cieux lui furent ouverts, et qu’il vit le souffle de Dieu descendant comme une colombe, et venant sur lui. C’est lorsque Jésus fut baptisé par Jean dans le Jourdain selon les anciennes coutumes judaïques, qui avaient établi le baptême de justice et celui des prosélytes. Cette coutume était prise des indiens ; les égyptiens l’avaient adoptée. Non seulement le ciel s’ouvrit pour Jésus ; non seulement le souffle de Dieu descendit en colombe ; mais on entendit une voix du ciel disant : celui-ci est mon fils chéri, en qui je me repose [2]. Les incrédules objectent, que si en effet les cieux s’étaient ouverts, si un pigeon était descendu du ciel sur la tête de Jésus, si une voix céleste avait crié celui-ci est mon fils chéri  ; un tel prodige aurait ému toute la Judée ; la nation aurait été saisie d’étonnement, de respect et de crainte ; on eût regardé Jésus comme un dieu. On répond à cette objection, que les cœurs des juifs étaient endurcis ; et qu’un miracle encore plus grand fut, que le Seigneur

  1. Le recueil de J.-C. Wagenseil est intitule Tela ignea Satanœ, sive arcani et horribiles Judœorum adversus Christum Deuin et christianam religionem libri anecdoti, 1681, deux volumes in-4o.
  2. Matthieu, III, 17.