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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome30.djvu/432

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mémoire. De bonne foi était-cc là un régiment de sodomites ? Montesquieu devait-il apporter contre eux le témoignage de Plutarque? Il ne lui arrive que trop souvent de falsifier ainsi les textes dont il fait usage,

XXI.

(( Pour aimer la frugalité, il faut en jouir. Ce ne seront point ceux qui sont corrompus par les délices qui aimeront la vie frugale. Et si cela avait été naturel et ordinaire, Alcibiade n’aurait pas fait l’admiration de Tunivers. » (Pages 48 et /jO, liv, V, chap. iv .)

Je ne prétends point faire des critiques grammaticales à un homme de génie ; mais j’aurais souhaité qu’un écrivain si spirituel et si mâle se fût servi d’une autre expression que celle de jouir de la frugalité. J’aurais cTésiré bien davantage qu’il n’eût point dit qu’Alcibiade fut admiré de l’univers pour s’être conformé dans Lacédémone à la sobriété des Spartiates. Il ne faut point, à mon avis, prodiguer ainsi les applaudissements de l’univers. Alcibiade était un simple citoyen, riche, ambitieux, vain, débauché, insolent, d’un caractère versatile. Je ne vois rien d’admirable à faire quelque temps mauvaise chère avec les Lacédémoniens, lorsqu’il est condamné dans Athènes par un peuple plus vain, plus insolent, et plus léger que lui, sottement superstitieux, jaloux, inconstant, passant chaque jour de la témérité à la consternation, digne enfin de l’opprobre dans lequel il croupit lâchement depuis tant de siècles sur les débris de la gloire de quelques grands hommes et de quelques artistes industrieux. Je vois dans Alcibiade un brave étourdi qui ne mérite certainement pas l’admiration de l’univers pour avoir corrompu la femme d’Agis, son hôte et son protecteur, pour s’être fait chasser de Sparte, pour s’être réduit à mendier un nouvel asile chez un satrape de Perse, et pour y périr entre les bras d’une courtisane. Plutarque et Montesquieu ne m’en imposent point ; j’admire trop Caton et Marc-Aurèle pour admirer Alcibiade.

Je passe une douzaine de pages sur la monarchie, le despotisme, et la république, parce que je ne veux me brouiller ni avec le Grand Turc, ni avec le Grand Mogol, ni avec la milice d’Alger. Je ferai seulement deux légères remarques historiques sur les deux chapitres que voici.

XXII.

Chap. XII, liv. V. « Qu’on n’aille point chercher de la magnanimité dans les États despotiques. Le prince n’y donnerait point