Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome31.djvu/135

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Felix qui potuit rerum cognoscere causas,
Atque metus omnes et inexorabile fatum
Subjecit pedibus, strepitumque Acherontis avari !

On demandait grâce à Épaminondas pour un officier débauché : il la refuse à ses amis, et l’accorde à une courtisane.

Christophe Colomb devine et découvre un nouveau monde ; un marchand, un passager lui donne son nom. Bel exemple des quiproquos de la gloire !

Ambassade d’un peuple de sauvages à Cortez : « Tiens, voilà cinq esclaves si tu es dieu, mange-les ; si tu es homme, voilà des fruits et des coqs d’Inde. »

Réponse d’un roi de Sparte à des orateurs de Clazomène : « De votre exorde il ne m’en souvient plus ; le milieu m’a ennuyé ; et quant à la conclusion, je n’en veux rien faire. »

C’est la réponse de Dieu aux suppliques des dévots.

Le roi Amasis, parvenu d’une condition servile au trône, fit fondre une cuvette dans laquelle il se lavait les pieds, et en fit un dieu.

On ne dit guère aujourd’hui un philosophe newtonien, parce qu’à l’attraction près, qui est si probable, tout est démontré dans Newton, et que la vérité ne peut porter un nom de parti. On disait les philosophes cartésiens, parce que Descartes n’avait que des imaginations, et que ceux qui suivaient sa doctrine étaient du parti d’un homme, et non de la vérité.

Aristote était un grand homme, sans doute ; mais que m’importe ? je n’ai rien à apprendre de lui. C’était un grand génie, je le veux ; mais il n’a dit que des sottises en philosophie. — Manco-Capac et Odin, Confucius. Zoroastre, Hermès, auraient peut-être été de nos jours de l’Académie des sciences. L’homme de génie serait tombé aux pieds du savant.

Le siècle présent n’est que le disciple du siècle passé. On s’est fait un magasin d’idées et d’expressions où tout le monde puise.

Qui est-ce qui disait que son fils allait étudier, et qu’il prêchait en attendant ?

La religion est comme la monnaie. les hommes la prennent sans la connaitre.

Belles paroles de Susanne de Suse en mourant : « Grand Dieu, je t’apporte quatre choses qui ne sont pas dans toi : le néant, la misère, les fautes et le repentir. »

Les paroles sont aux pensées ce que l’or est aux diamants : il est nécessaire pour les enchâsser, mais il en faut peu.