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214 REMARQUES SUR LE CID.

La valeur de son père en son temps sans pareille,

Tant qu'a duré sa force, a passé pour merveille * ,

Ses rides sur son front- ont gravé ses exploits,

Et nous disent encor ce (ju'il fut autrefois.

Je me promets du fils ce que j'ai vu du père;

Et ma fille, en un mot, peut l'aimer et me plaire.

Va l'en entretenir; mais dans cet entretien

Cache mon sentiment et découvre le sien.

Je veux (pi'à mon retour nous en parlions ensemble :

L'heure à présent m'a[)pelle au conseil (|ui s'assemble ;

Le roi doit à son fils ciioisir un gouverneur.

Ou plutôt m'élever à ce haut rang d'honneur.

Ce que pour lui mon bras chaque jour exécute

IMe défend de penser qu'aucun me le dispute^.

��SCÈNE II.

CHIMÈNE, ELVIRE. E LVIRE, à part.

Quelle douce nouvelle à ces jeunes amants! Et que tout se dispose à leurs contentements!

c H 1 M ii X E . Eh bien! Elvire, enfin, que faut-il que j'espère^? Que dois-je devenir? et que t'a dit mon père?

1. Tant qu'a dure sa force, a passé pour njerveillo.

A passé pour merveille a été excusé par l'Académie; aujourd'hui cette expres- sion ne passerait point : elle est commune, froide et lâche. Les premiers qui écri- virent purement, Racine et Boileau, ont proscrit tous ces termes de merveille, de sans pareille, sans seconde, miracle de nos jours, soleil, etc.; et plus la poésie est devenue dlflicile, plus elle est belle. (ISote de Voltaire.)

2. Ses rides sur son front. Voyez le jugement de l'Académie, auquel nous ren- voyons pour la plupart des vers qu'elle a censurés ou justifiés.

Racine se moqua de ce vers dans la farce des Plaideurs: il y dit d'un vieux huissier (acte I*"", scène v) :

Ses rides sur son front gravaient tous ses exploits.

Cette plaisanterie ne plut point du tout à l'autour du Cid. {Id.)

■i. Me défend de penser qu'aucun me le disputo.

Vous voyez que ces deux derniers vers sont le fondement de la querelle qui doit suivre ; et qu'ainsi on fait très-mal de commencer aujourd'hui la pièce par la querelle imprévue du comte et de don Dièguc. ( Id.)

4. Corneille, fatigué de toutes les critiques qu'on faisait du r/(/, et ne sachant

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