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284 UEMAROUES SUR LES IIORACES.

Grec au pied du mont Aventin a ûù. la rassurer? Le premier mouvement, dans une telle occasion, n'est-il pas de dire : Ce Grec m'a trompée, c'est un faux prophcte! Avait-elle besoin d'un songe pour craindre ce que deux armées rangées en bataille devaient assez lui faire redouter?

Vers 85, J'ai vu du sang, des morts, et n'ai rien vu de suite...

Ce songe est beau en ce qu'il alarme un esprit rassuré par un oracle. Je remarquerai ici qu'en général un songe, ainsi qu'un oracle, doit servir au nœud de la pièce : tel est le songe atlmi- rable d'Atlialie; elle voit un enfant en songe; elle trouve ce même enfant dans le temple ; c'est là que l'art est poussé à sa perfection.

Un rêve qui ne sert qu'à faire craindre ce qui doit arriver ne peut avoir que des beautés de détail, n'est qu'un ornement passager. C'est ce qu'on appelle aujourd'hui un remplissage. Mille songes, mille images, mille amas, sont d'un style trop négligé, et ne disent rien d'assez positif.

Vers 89. C'est en contraire sens qu'un songe s'interprète.

Pourquoi un songe s'interprète-t-il en sens contraire? ^'oyez les songes expliqués par Joseph, par Daniel : ils sont funestes par eux-mêmes et par leur explication.

Vers 93. Soit que Rome y succombe, ou qu'Albe ait le dessous, Cher amant, n'attends plus d'être un jour mon époux.

Avoir le dessus ou le dessous ne se dit que dans la poésie bur- lesque ; c'est le di sopra et le disotto des Italiens. L'Arioste emploie cette expression lorsqu'il se permet le comique ; le Tasse ne s'en sert jamais.

SCÈNE IV.

Vers 1. N'en doutez point, Camille, et revoyez un homme Qui n'est ni le vainqueur ni l'esclave de Rome.

Camille vient de dire, à la fin de la scène précédente :

Jamais ce nom (d'époux) ne sera pour un homme Qui soit ou le vain([ueur ou l'esclave de Rome.

On ne permet plus de répéter ainsi un vers.

Vers 3. Cessez d'appréhender de voir rougir mes mains

Du poids honteux des fers ou du sang des Romains.

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