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ACTE II, SCENE III. 289

��SCENE III.

Vers 3. Oue les hommes, les dieux, les démons, et le sort, Préparent contre nous un général ellbrt.

Cet entassement, cette répétition, cette combinaison de ckl, de dieux, d'enfer, de démons, de terre et à'hommes, de cruel, d'hor- rible, d'affreux, est, je l'avoue, bien condamnable : cependant le dernier vers fait presque pardonner ce défaut.

Vers l'I. Il épuise sa force à former un malheur

Pour mieux se mesurer avec notre valeur.

Le sort qui veut se mesurer avec la valeur paraît bien recherché, bien peu naturel; mais que ce qui suit est admirable!

Vers i 4. Hors de l'ordre commun il nous fait des fortunes

n'est pas une expression propre. Ce mot de fortunes au pluriel ne doit jamais être employé sans épithète : bonnes et mauvaises fortunes, fortunes diverses, mais jamais des fortunes. Cependant le sens est si beau, et la poésie a tant de privilèges, que je ne crois pas qu'on puisse condamner ce vers.

Vers 18. Mille déjà l'ont fait, mille pourroient le faire. *

Rien ne fait mieux sentir les difficultés attachées à la rime que ce vers faible. Ces mille qui ont fait, ces mille qui pour- raient faire, pour rimer à ordinaire. Le reste est d'une beauté achevée.

Vers 43 Albe montre en effet

Qu'elle m'estime autant que Rome vous a fait

n'est pas français. On peut dire en prose, et non en vers : J'ai dû vous estimer autant que je fais, ou autant que je le fais, mais non pas autant que je vous fais; et le mot faire, qui revient immédiate- ment après, est encore une faute ; mais ce sont des fautes légères qui ne peuvent gâter une si belle scène.

Vers 59. Je rends grâces aux dieux de n'être pas Romain, Pour conserver encor quelque chose d'humain.

Cette tirade fit un effet surprenant sur tout le public, et 1^ deux derniers vers sont devenus un proverbe, ou plutôt une maxime admirable.

31. — CoMM. SIR Corneille. I. 19

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