Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome33.djvu/441

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gagné sur le reste, supposé que ce soient eux qui aient vendu l’édition. Ne pourriez-vous point alors écrire en droiture à M. Rouillé, lui dire qu’étant de vos amis depuis longtemps je vous ai prié de faire chercher à Rouen l’édition de ces Lettres ; que vous avez engagé ceux qui s’en étaient chargés à la remettre, etc. ; ou bien, voudriez-vous faire écrire le premier président[1] ? il s’en ferait honneur, et il ferait voir son zèle pour l’inquisition littéraire qu’on établit. Soit que ce fût vous, soit que ce fût le premier président, je crois que cela me ferait grand bien, si le garde des sceaux pouvait savoir, par ce canal et par une lettre écrite à M. Rouillé, que j’ai écrit à Rouen, le 2 mai, pour faire chercher l’édition, à quelque prix que ce pût être.

Je remets tout cela à votre prudence et à votre tendre amitié. Votre esprit et votre cœur sont faits pour ajouter au bonheur de ma vie quand je suis heureux, et pour être ma consolation dans mes traverses.

À présent que je vais être tranquille dans une retraite ignorée de tout le monde, nous vous enverrons sûrement des Samson et des pièces fugitives en quantité. Laissez faire, vous ne manquerez de rien, vous aurez des vers.

J’embrasse tendrement mon ami Formont et notre cher du Bourg-Theroulde. Adieu, mon aimable ami, adieu. Écrivez-moi sous l’enveloppe de l’abbé Moussinot, cloître Saint-Merry.


406. — Á M. DE CIDEVILLE.
Ce 11 mai, en passant.

Je n’ai que le temps de vous écrire, mon cher ami, de ne faire nul usage du billet de treize cent soixante-huit livres qu’on vous a envoyé sans ma participation. Il vaut beaucoup mieux que le fils[2] du vieux bonhomme fasse ce dont il était convenu avec moi, en cas qu’il voie que cette démarche puisse être utile. Peut-être en a-t-il déjà vendu ; et, en ce cas, il serait puni tout aussi sévèrement, et on lui répondrait comme Dieu aux Juifs : Sacrificia tua non volo[3]. C’est à lui à voir s’il est coupable, et jusqu’à quel point il peut compter sur l’indulgence des gens à qui il a affaire. Il faut qu’il commence par m’instruire de ses démarches, afin que je sache, de mon côté, sur quoi compter. Je ne veux ni ne

  1. Pontcarré.
  2. Jore, associé à son père, comme libraire du clergé. (Cl.)
  3. Il y a dans Osée, VI, 6 : Misericordiam volui, et non sacrificium.