Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome34.djvu/208

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portent aux génies supérieurs. Des gens peu éclairés se laissent séduire par la malignité des méchants, semblables à ces chiens qui suivent en tout le chef de meute, qui aboient quand ils entendent aboyer, et qui prennent servilement le change avec lui. Quiconque est éclairé par la vérité se dégage des préjugés ; il la découvre, et les déteste ; il dévoile la calomnie, et l’abhorre. Soyez sûr, monsieur, que ces considérations font que je vous rendrai toujours justice. Je vous croirai toujours semblable à vous-même. Je m’intéresserai toujours vivement à ce qui vous regarde, et la Hollande, pays qui ne m’a jamais déplu, me deviendra une terre sacrée puisqu’elle vous contient. Mes vœux vous suivront partout, et la parfaite estime que j’ai pour vous, étant fondée sur votre mérite, ne cessera que quand il plaira au créateur de mettre fin à mon existence. Ce sont les sentiments avec lesquels je suis, monsieur, votre très-parfaitement affectionné ami,

Fédéric

706. — À M. THIERIOT[1].
Ce 24 décembre.

Je ne vous écris point de ma main, mon cher ami, parce que je me trouve un peu mal. J’ai reçu une nouvelle lettre du prince royal, beaucoup plus pleine encore de bonté que la première ; et, ce qui vous surprendra, c’est qu’elle est écrite avec la correction et l’élégance d’un Français homme d’esprit, dont le métier serait d’écrire. Jamais de si grands sentiments n’ont été si bien exprimés. Je vous en enverrai une copie. Je sais combien votre cœur y sera sensible. Votre correspondance avec ce prince est, en vérité, ce qui pouvait vous arriver de plus flatteur dans votre vie. J’ai pris la liberté de lui écrire qu’il ne pouvait faire un meilleur choix. Vous verrez par sa lettre qu’il m’honore de quelque confiance. Je suis très-persuadé qu’un jour votre emploi auprès de lui ne sera pas borné aux seules belles-lettres.

Ma mauvaise santé m’empêchera de lui faire ma cour, cet hiver. Je pourrais bien aller aux eaux d’Aix-la-Chapelle. Écrivez-moi des nouvelles de votre Parnasse, La poste va partir, je n’ai pas le temps d’écrire à M. berger. Je vous prie de l’assurer de ma tendre amitié, et de lui dire que je lui demande en grâce de m’écrire des nouvelles une fois la semaine.

Mon adresse est : À monsieur de Révol, chez monsieur Hellin, banquier, à Anvers. Je vous demande à vous et à M. Berger un profond secret sur notre commerce et sur cette adresse. Je vous embrasse. Comptez que vous n’aurez jamais d’ami plus tendre que moi.

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.