Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome34.djvu/419

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dans la simplicité du sujet, et dans l’attention que j’ai eue de n’en pas partager l’intérêt par une intrigue étrangère. C’est une occupation digne d’un génie comme le vôtre que d’employer son loisir à juger les ouvrages de tous pays ; voilà la vraie monarchie universelle : elle est plus sûre que celle où les maisons d’Autriche et de Bourbon ont aspiré. Je ne sais encore si Votre Altesse royale a reçu mon paquet et la lettre de Mme la marquise du Châtelet, par la voie de M. Plötz. Je vous quitte, monseigneur, pour aller vite travailler au nouvel ouvrage dont j’espère amuser, dans quelques semaines, le Trajan et le Mécène du Nord.

Je suis avec le plus profond respect et la plus tendre reconnaissance, monseigneur, de Votre Altesse royale, etc.


826. — À M. THIERIOT.
Cirey, ce 7 février.

Je vous envoie, mon cher ami, une lettre pour le prince royal, en réponse à celle que vous m’avez dépêchée par l’autre voie. Sa lettre contenait une très-belle émeraude accompagnée de diamants brillants, et je ne lui envoie que des paroles. Soyez sûr, mon cher Thieriot, que mes remerciements pour lui seront bien plus tendres et bien plus énergiques quand il aura fait pour vous ce que vous méritez et ce que j’attends. Ne soyez point du tout en peine de la façon dont je m’exprime sur votre compte, quand je lui parle de vous ; je ne lui écris jamais rien qui vous regarde, qu’à l’occasion des lettres qu’il peut faire passer par vos mains, et que je le prie de vous confier. Je suis bien loin de paraître soupçonner qu’il soit seulement possible qu’il vous ait donné le moindre sujet d’être mécontent. Quand je serais capable de faire cette balourdise, l’amitié m’en empêcherait bien. Elle est toujours éclairée quand elle est si vraie et si tendre. Continuez donc à le servir dans le commerce aimable de littérature dont vous êtes chargé, et soyez sûr, encore une fois, qu’il vous dira un jour : « Euge, serve bone et fidelis, quia super pauca fuisti fidelis[1], etc. »

Vous vous intéressez à mes nièces ; vous savez sans doute ce que c’est que M. de La Rochemondière[2], qui veut de notre aînée. Je le crois homme de mérite, puisqu’il cherche à vivre avec

  1. Matthieu, XXV, 21, 23.
  2. Le Royer de La Rochemondière était conseiller auditeur à la chambre des comptes. (Cl.)