Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome34.djvu/71

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le firent imprimer secrètement. Ils attendirent que je fusse à la campagne[1], à soixante lieues de Paris, pour mettre au jour leur larcin. La première édition qu’ils en firent était presque débitée, et je ne savais pas que le livre parût. J’appris cette triste nouvelle, et l´indignation du gouvernement. Je vous écrivis sur-le-champ plusieurs lettres, pour vous dire de remettre toute votre édition à M. Rouillé, et pour vous en offrir le prix. Je ne reçus point de réponse : vous étiez à la Bastille, J’ignorais le crime de François Josse ; tout ce que je pus faire alors fut de me renfermer dans mon innocence et de me taire.

Cependant René, ce petit libraire, fit en secret une nouvelle édition ; et François, jaloux du gain que son cousin allait faire, joignit à son premier crime celui de faire dénoncer son cousin René. Ce dernier fut arrêté, cassé de maîtrise, et son édition confisquée.

Je n’appris ce détail que dans un séjour de quelques semaines que je vins faire, malgré moi, à Paris[2], pour mes affaires.

J’eus la conviction du crime de François Josse ; j’en dressai un mémoire pour M. Rouillé, Cependant cet homme a joui du fruit de sa méchanceté impunément. Voilà tout ce que je sais de votre affaire ; voilà la vérité, devant Dieu et devant les hommes. Si vous en retranchiez la moindre chose, vous seriez coupable d’imposture. Vous y pouvez ajouter des faits que j’ignore, mais tous ceux que je viens d’articuler sont essentiels. Vous pouvez supplier votre protecteur de montrer ma lettre à monsieur le garde des sceaux ; mais surtout prenez bien garde à votre démarche, et songez qu’il faut dire la vérité à ce ministre.

Pour moi, je suis si las de la méchanceté et de la perfidie des hommes que j’ai résolu de vivre désormais dans la retraite, et d’oublier leurs injustices et mes malheurs,

À l’égard d’Alzire, c’est au sieur Demoulin qu’il faut s’adresser. Je ne vends point mes ouvrages, je ne m’occupe que du soin de les corriger : ceux à qui j’en ai donné le profit s’accommoderont sans doute avec vous. Je suis entièrement à vous, etc.


585. — À M. L’ABBÉ MOUSSINOT[3].
À Cirey, ce…

Grand merci, mon cher correspondant. Faites faire d’abord deux bonnes copies, après quoi nous en ferons d’autres ; mais

  1. À Monjeu, près d’Autun.
  2. En mars et en avril 1735.
  3. Édition Courtat.