Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome38.djvu/458

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contre moi ; un prêtre ex-jésuite[1], que j’avais sauvé du dernier supplice, me payant par des libelles diffamatoires du service que je lui avais rendu ; un homme[2], plus coupable encore, faisant imprimer mon propre ouvrage du Siècle de Louis XIV avec des notes[3] dans lesquelles la plus crasse ignorance vomit les plus infâmes impostures ; un autre, qui vend à un libraire[4] quelques chapitres d’une prétendue Histoire universelle, sous mon nom ; le[5] libraire assez avide pour imprimer ce tissu informe de bévues, de fausses dates, de faits et de noms estropiés ; et enfin des hommes assez lâches et assez méchants[6] pour m’imputer la publication de cette rapsodie. Je vous ferais voir la société infectée de ce genre d’hommes inconnu à toute l’antiquité, qui, ne pouvant embrasser une profession honnête, soit[7] de manœuvre, soit de laquais, et sachant malheureusement lire et écrire, se font courtiers de littérature[8], vivent de nos ouvrages, volent des manuscrits, les défigurent, et les vendent. Je pourrais me plaindre que[9] des fragments d’une plaisanterie faite, il y a près de trente ans, sur le même sujet que Chapelain eut la bêtise de traiter sérieusement, courent[10] aujourd’hui le monde par l’infidélité et[11] l’avarice de ces malheureux qui ont mêlé leurs grossièretés à ce badinage, qui en ont rempli les vides avec autant de sottise que de malice, et qui enfin, au bout de trente ans, vendent partout en manuscrit ce qui n’appartient qu’à eux, et qui n’est digne que d’eux. J’ajouterais qu’en dernier lieu on[12] a volé une partie des matériaux que j’avais rassemblés dans les archives publiques pour servir à l’Histoire de la Guerre de 1741, lorsque j’étais historiographe de France : qu’on[13] a vendu à un libraire de Paris ce fruit de[14] mon travail ;

  1. L’abbé Desfontaines.
  2. La Beaumelle.
  3. Var. : Des notes où la plus crasse ignorance débite les calomnies les plus effrontées ; un autre…
  4. Var. : à un libraire une prétendue Histoire universelle.
  5. Var. : et le libraire assez avide, assez sot pour, etc.
  6. Var. : pour m’imputer cette rapsodie.
  7. Var. : soit de laquais, soit de manœuvres.
  8. Var. : de la littérature, volent des manuscrits.
  9. Var. : qu’une plaisanterie.
  10. Var. : court.
  11. Var. : et l’infâme avarice de ces malheureux qui l’ont défigurée avec autant de sottise que de malice, et qui, au bout de trente ans, vendent partout cet ouvrage, lequel certainement n’est pas le mien, et qui est devenu le leur.
  12. Var. : on a osé fouiller dans les archives les plus respectables, et y voler une partie des mémoires que j’y avais mis en dépôt lorsque j’étais…
  13. Var. : et qu’on a vendu.
  14. Var. : de mes travaux. Je vous peindrais.