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pas entendu parler de lui : il est juste qu’il entende parler de vous, à moins qu’il n’ait payé à M. Turckeim de Strasbourg. Mais M. Turckeim ne m’a point écrit. Vraiment oui, Jeanne d’Arc est imprimée, elle est partout. La pauvre diablesse est horriblement défigurée. Les Anglais, les Chapelain[1], les libraires, et moi, nous avons bien maltraité Jeanne. On prend fort bien la chose à Paris et en Suisse, mais les faquins de libraires ont très-mal pris leur temps. Ce n’était pas le temps de rire, quand la moitié d’un royaume est engloutie sous la terre, et que chacun tremble dans son lit. Le Tout est bien et l’optimisme en ont dans l’aile. Je présente mes respects à M. et à Mme de klinglin.

Comment se porte Mme Dupont ? Ma nièce et moi nous sommes à vous. V.


3073. — À M. POLIER DE BOTTENS.
Aux Délices, 2 décembre.

Mme Denis, mon cher monsieur, est revenue enchantée de vous, et pénétrée de la bonté de votre cœur. Elle ne me parle que de vous et de notre cher ami M. de Brenles, Il n’y a ni maladie, ni ordonnance du docteur Tronchin qui tienne, il faut venir à Monrion se mettre entre les mains du docteur Tissot[2], dussé-je être disséqué comme mon pauvre ami Giez. Je compte écrire à M. de Brenles en vous écrivant ; je m’imagine que vous êtes assez heureux l’un et l’autre pour vous voir tous les jours. Quand pourrai-je en faire autant, et venir enfin dans la petite retraite où mon cœur m’appelait depuis si longtemps !

Croyez-vous qu’on imagine à Genève qu’il y a eu un tremblement de terre en France[3] comme en Portugal, parce que le cour-

  1. Caux de Cappeval, qui donna, en 1772, une traduction en vers latins de la Henriade, avait proposé par souscription, en 1757, une nouvelle édition de la Pucelle de Chapelain. Cette nouvelle édition, qui n’a point été faite, eut compris les vingt-quatre chants dont les douze derniers sont encore manuscrits. Les éditions de la Pucelle de Chapelain en quinze, dix-huit et vingt chants, sous les dates de 1755, 1756, 1757, 1762, dans le Catalogue La Vallière (2e partie), nos 15831-36, sont des éditions du poëme de Voltaire. Cette fausse indication a passé dans quelques ouvrages.
  2. Né le 20 mars 1728, au village de Grancy, entre Lausanne et le Jura, d’un père qui était commissaire-arpenteur. Ce célèbre médecin acheta Monrion vers 1774 ; ce fut lui qui y fit construire l’escalier à double rampe formant une espèce de terrasse du côté du lac. Voltaire adressa plus tard quelques lettres à Tissot, mais elles sont restées inconnues jusqu’à présent. Voyez une note de la lettre 2843.
  3. Le tremblement de terre du 1er novembre 1755 s’est fait ressentir sur quelques points de la France. Il a déplacé l’une des sources des eaux thermales de Néris dans le Bourbonnais (aujourd’hui département de l’Allier). (B.)