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CORRESPONDANCE.

devait en user avec moi selon l’usage ordinaire, qui est de n’exiger que la moitié des lods. Si donc, monsieur, le sieur Vachat s’était conformé à la noblesse de vos procédés, il n’aurait exigé que vingt-cinq livres de France ; et, s’il avait imité la manière dont j’en use avec mes vassaux, il se serait réduit à douze livres dix sous.

Je suis bien loin de demander une telle diminution, je n’en demande aucune ; je suis prête à payer tout ce que vous jugerez convenable : c’est à messieurs du chapitre qu’il appartient de mettre un prix au fonds dont nous vous devons le cens. Vachat, étant votre fermier, ne peut exiger pour lods et ventes que la sixième partie de ce fonds même ; cependant il exige plus que la valeur du terrain. Il veut me ruiner en frais ; il a pris pour m’assigner le temps où j’étais très-malade, et où je ne pouvais répondre ; il m’a fait condamner par défaut ; il m’a traduite au parlement de Dijon, et il a dit publiquement qu’il me ferait perdre plus de deux mille écus pour ce cens de deux sous et demi.

Votre chapitre, monsieur, est trop équitable et trop religieux pour ne pas réprimer une telle vexation. Je n’ai jamais contesté votre droit, sur quelque titre qu’il puisse être fondé. Je suis si ennemie des procès, que je n’ai pas seulement répondu aux manœuvres de Vachat. Je suis prête à consigner le double et le triple, s’il le faut, de la somme qui vous est due. Ayez la bonté d’évaluer le fonds vous-même, et cette évaluation servira de règle pour l’avenir. Je vous propose de nommer qui il vous plaira pour arbitre de cette évaluation. Voulez-vous choisir monsieur le maire de Gex, M. de Menthon, gentilhomme du voisinage, et le curé de la terre de Ferney, où ces terrains sont situés ? Vous préviendrez par là non-seulement ce procès injuste, mais tous les procès à venir. Ce sera une action digne de votre piété et de votre justice.

6858. — À M. MOULTOU[1].
24 avril 1767.

Voilà deux grandes nouvelles, mon cher philosophe : voilà une espèce de persécuteurs bannie de la moitié de l’Europe[2], et une espèce de persécutés qui peut enfin espérer de jouir des

  1. Éditeur, A. Coquerel.
  2. Les jésuites.