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ANNÉE 1767

devais rendre publique, et que j’ai supprimée, en attendant que je prenne une résolution plus convenable.

Dans ces circonstances, M. Lavaysse de Vidou m’a écrit le 25 de juin. Il ignore apparemment la conduite de son beau-frère ; je le plains beaucoup. Je vous prie de lui faire part de mes sentiments, et de lui montrer cette lettre.

Je crains bien que nous n’ayons d’autre parti à prendre, au sujet des Sirven, que celui de la douleur et de la résignation. Ils sont innocents, on n’en peut douter. On leur a ôté leur honneur et leurs biens ; on les a condamnés à la mort comme parricides : on leur doit justice. Mais, d’un côté, le malheureux procès de M. de Beaumont ; de l’autre, la présence de monsieur le procureur général du Languedoc, qui soutiendra les droits de son parlement ; enfin les bruits affreux qui courent sur les protestants des provinces méridionales, ne permettent pas de se flatter qu’on puisse s’adresser au conseil avec succès. Les nouvelles horreurs de La Beaumelle sont encore un obstacle. Toutes ces fatalités réunies laissent peu d’espérance. Vous voyez les choses de plus près ; je m’en rapporte à vous. Je vous supplie de m’instruire de l’état des choses.

La multitude de lettres que j’ai à écrire aujourd’hui, et ma santé, qui baisse tous les jours, me mettent hors d’état de répondre aussi au long que je le voudrais à M. Lavaysse de Vidou. Le peu que je vous écris, mon cher ami, suffira pour le convaincre de mes sentiments, et de l’état où je me trouve. Ayez donc la bonté, encore une fois, de lui faire lire cette lettre ; c’est tout ce que je puis vous dire, dans l’incertitude où je suis, et dans les souffrances de corps que j’éprouve.

Je vous embrasse tendrement, et j’attends mes consolations de votre amitié.

6929. — À M. DE BELLOY.
À Ferney, 6 juillet.

Il y a quelques années, monsieur, que je ne lis aucun papier public ; j’ignore dans ma retraite ce qui se fait sur la terre. Je sais pourtant ce qui se passe à Moscou ; mais ce n’est pas par le Mercure. L’impératrice de Russie daigna me mander, l’année passée[1], qu’elle avait converti Abraham Chaumeix, et qu’elle en

  1. La lettre de Catherine II est du 11-22 auguste 1765 ; voyez tome XLIV page 45.