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CORRESPONDANCE.

j’aie vu ces campagnes du maréchal, où l’on m’a dit qu’il y a des choses fort instructives.

Le petit livre du Militaire philosophe vaut assurément mieux que toutes les campagnes. Il est très-estimé en Europe de tous les gens éclairés. J’ai bien de la peine à croire qu’un militaire en soit l’auteur. Nous ne sommes pas comme les anciens Romains, qui étaient à la fois guerriers, jurisconsultes et philosophes.

Vous ne me parlez plus de votre cou ; pour moi, je vous écris de mon lit, dont mes maux me permettent rarement de sortir. On ne peut s’intéresser à vos affaires, ni vous embrasser plus tendrement que je le fais.

7075. — À M. LE DUC DE BOUILLON[1].
Ferney, 25 novembre.

Monseigneur, les bontés dont Votre Altesse m’a toujours honoré m’enhardissent à vous faire une prière. On fait actuellement une nouvelle édition du Siècle de Louis XIV. J’ai toujours pensé que la cause de la persécution soufferte par M. le cardinal de Bouillon lui était très-honorable. Il défendit généreusement l’archevêque de Cambrai contre des ennemis acharnés, qui voulaient le perdre pour des billevesées mystiques. Je trouve la lettre qu’il écrivit à Louis XIV, en quittant la France, non-seulement très-noble, mais très-justifiable, puisqu’il était né lorsque son père était souverain de droit et de fait.

Je présume que Votre Altesse a des lettres de M. le cardinal de Bouillon sur cette affaire : si elle daigne me les confier, j’en ferai usage avec le zèle que j’ai pour sa maison, sans la compromettre, et en conciliant les devoirs d’un historien avec ceux d’un sujet.

Si vous m’accordez, monseigneur, la grâce que je vous demande, vous pourrez aisément me faire tenir le paquet contresigné par M. le prince de Soubise ou par quelque autre.

Je joindrai ma reconnaissance à l’ancien attachement et au profond respect avec lesquels j’ai l’honneur d’être, monseigneur, de Votre Altesse, le très-humble et très-obéissant serviteur.

Voltaire.
  1. Éditeurs, de Cayrol et François.