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ANNÉE 1767

sement, pour demander à l’Amour quelques nouvelles grâces. Après que le chœur a chanté :

je revÔ ciel ! ô ciel ! elle respire.
je revDieu d’amour, quel est ton empire !


il faudra que le potier dise ces quatre vers :

Je revole aux autels du plus charmant des dieux.
Son ouvrage m’étonne, et sa beauté m’enflamme.
Son Amour, descends tout entier dans mon âme,
Son ouvraComme tu règnes dans ses yeux[1].

Le musicien même peut répéter le mot d’amour, pour cause d’énergie ; mais ce musicien ne répond point à mes lettres. Ce musicien me traite comme Rameau traitait l’abbé Pellegrin, à qui il n’écrivait jamais. Je le crois fort occupé à Versailles ; mais fût-il premier ministre, il ne faut pas négliger Pandore.

Tout paraît tendre aujourd’hui à la réconciliation dans le monde, depuis qu’on a chassé les jésuites de quatre royaumes. La tolérance vient d’être solennellement établie en Pologne comme en Russie, c’est-à-dire dans environ treize cent mille lieues carrées de pays ; ainsi la Sorbonne n’a raison que dans deux mille cinq cents pieds carrés, qui composent la belle salle où elle donne ses beaux décrets. Certainement le genre humain l’emportera à la fin sur la Sorbonne. Ces cuistres-là n’en ont pas encore pour longtemps dans le ventre. C’est une bénédiction de voir comme le bon sens gagne partout du terrain : il n’en est pas de même du bon goût, c’est le partage du petit nombre des élus.

Les perruques de Genève proposent actuellement des accommodements aux tignasses. Ce n’était pas la peine d’appeler à grands frais trois puissances médiatrices, pour ne rien faire de ce qu’elles ont ordonné. M. le duc de Choiseul doit être las de voir des gens qui demandent à Hercule sa massue pour tuer des mouches. Toute cette affaire de Genève est du plus énorme ridicule.

Tout ce qui est à Ferney vous embrasse assurément de tout son cœur.

  1. Ces vers n’ont point été admis dans la pièce. Ils étaient destinés à la scène i de l’acte II.