Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome45.djvu/56

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bien de cette histoire du Dauphiné. Cette province, heureusement pour lui, n’a pas un écrivain dont la lecture soit supportable. Elle peut être enfin le fondement de sa fortune.

En vous priant d’agréer mes hommages et ceux de Mme Denis, permettez que je vous envoie un fragment d’un endroit de ma lettre[1] à la personne dont je vous ai parlé ; vous verrez par là à quel homme j’ai affaire. Je vous conjure de me garder le plus profond secret.


6670. — À FRÉDÉRIC,
landgrave de hesse-cassel.
À Ferney, le 13 janvier.

Monseigneur, comme je sais que vous aimez passionnément les hypocrites, je prends la liberté de vous envoyer pour vos étrennes un petit Éloge de l’Hypocrisie[2], adressé à un digne prédicant de Genève. Si cela peut amuser Votre Altesse sérénissime, l’auteur, quel qu’il soit, sera trop heureux.

Votre Altesse sérénissime est informée, sans doute, de la guerre que les troupes invincibles de Sa Majesté très-chrétienne font à l’auguste république de Genève. Le quartier général est à ma porte. Il y a déjà eu beaucoup de beurre et de fromage d’enlevé, beaucoup d’œufs cassés, beaucoup de vin bu, et point de sang répandu. La communication étant interdite entre les deux empires, je me trouve bloqué dans ce petit château que Votre Altesse sérénissime a honoré de sa présence. Cette guerre ressemble assez à la Secchia rapita ; et si j’étais plus jeune, je la chanterais assurément en vers burlesques[3]. Les prédicants, les catins, et surtout le vénérable Covelle, y joueraient un beau rôle. Il est vrai que les Genevois ne se connaissent pas en vers ; mais cela pourrait réjouir les princes aimables qui s’y connaissent. La seule chose que j’ambitionne à présent, monseigneur, ce serait de venir au printemps vous renouveler mes sincères hommages.

J’ai l’honneur d’être, etc.

  1. La lettre précédente.
  2. Voyez cette pièce, tome X, parmi, les Satires.
  3. Voltaire a chanté la Guerre civile de Genève ; voyez tome IX.