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Harpe, ne viens-je pas réclamer une pension pour ce mérite dans l’indigence ; je viens seulement, monsieur, empiéter sur vos attributions et contrôler le chiffre de 2,000 livres dont Sa Majesté a bien voulu me gratifier. Il me semble que M. de La Harpe n’ayant pas de pension, la mienne est trop forte de moitié, et qu’on doit la partager entre lui et moi.

Je vous aurai donc, monsieur, une dernière reconnaissance si vous voulez bien sanctionner cet arrangement et faire expédier à M. de La Harpe le brevet de la pension de 1,000 livres, sans lui faire savoir que je suis pour quelque chose dans cet événement. Il sera aisément persuadé, ainsi que tout le monde, que cette pension est une juste récompense des services qu’il a rendus à la littérature[1].

Daignez, monsieur le contrôleur général, accepter d’avance mes remerciements et croire au profond respect de votre très-humble et très‑obéissant serviteur.

Arouet de Voltaire,
gentilhomme ordinaire de la chambre du roi.
6710. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL[2].
2 février 1767.

Nous apprenons par la sœur de M. Thurot[3] que Dieu est juste. Nous ne savons point encore de détails ; mais nous pensons que sa justice doit écraser les diables, et que surtout le diable Janin doit être recommandé fortement à M. de La Reynière. J’en ai écrit à M. de Chauvelin. Je vous demande en grâce de m’aider et de venger la sœur de Thurot. Je respire enfin ; je ne fais plus de paquets, et nous répétons les Scythes.

Vous devez avoir reçu à présent les deux exemplaires envoyés à M. le duc de Praslin bien corrigés. Si vous en voulez encore une copie, on vous l’enverra ; mais vous pouvez aisément faire porter sur vos anciens exemplaires les corrections qui sont sur les nouveaux, et vous pouvez aussi en donner un à M. de Thi-

  1. Dans la lettre à d’Alembert du 10 août 1767, quelques mots sembleraient confirmer cette démarche, qui n’aboutit pas. « Je ne ris point, dit Voltaire à d’Alembert, quand on me dit qu’on ne paye point vos pensions ; cela me fait trembler pour une petite démarche que j’ai faite auprès de M. le contrôleur général en faveur de M. de La Harpe ; je vois bien que, s’il fait une petite fortune, il ne la devra jamais qu’à lui-même. »
  2. Éditeurs, de Cayrol et François.
  3. Mme Le Jeune.