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CORRESPONDANCE

excepté les Welches. Mais je vous prie de croire que j’ai l’hypothèque la plus assurée sur la terre d’Annemasse, attendu que j’ai prêté expressément pour en faire l’acquisition, et pour prix non payé. J’ai été substitué aux droits de M. de Barol, ci-devant possesseur de cette terre. J’en ai la reconnaissance. Toutes les règles ont été observées dans mon contrat.

Je plains beaucoup Mme de Monthou, et sa rage de se remarier. Je souhaite que ses autres créanciers entrent comme moi dans quelque composition.

Voulez-vous bien avoir la bonté, monsieur, de me marquer si M. de Foncet veut pêcher Annemasse, soit en eau claire, soit en eau trouble. Je n’aurai pas à me reprocher d’avoir dépouillé la veuve et l’orphelin ; et, si vous accommodez cette affaire, je vous serai très-obligé de me faire rendre quelques sous pour les louis d’or que j’ai donnés.

Je souhaite à Stanislas et à Catau toutes les prospérités imaginables ; mais à vous surtout, monsieur, que j’aime mieux que tous les potentats du Nord. V.

7314. — À M. MARIN.
À Ferney, le 19 auguste.

J’ai été un peu à la mort, mon cher monsieur : un petit tour de broche de plus, on aurait dit : Il est mort, mais cela n’est rien ; sans cela je vous aurais bien remercié sur-le-champ de la petite réponse de M. Linguet au modeste La Bletterie[1]. M. Linguet me paraît un Français plein d’esprit, et La Bletterie, un Welche assez impertinent. Il prétend que j’ai oublié de me faire enterrer ; c’est ce que je n’oublie point du tout, car je me suis fait bâtir un petit tombeau, fort propre, de bonne pierre de roche, qui d’ailleurs est d’une simplicité convenable ; mais, comme il faut toujours être poli, je dis au sieur de La Bletterie :

Que mes Je ne prétends point oublier
Que mes œuvres et moi nous avons peu de vie ;
Mais je suis très-poli, je dis à La Blettrie :
Que mes « Ah ! monsieur, passez le premier ! »

  1. Lettre sur la nouvelle traduction de Tacite, par M. l’abbé de La Bletterie, avec un petit recueil de phrases élégantes tirées de la même traduction, pour l’usage de ses écoliers, 1768, in-12.