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478 l’UEFACK DE LE DITECH.

de recherches. J’avoue <[uo jaime à voir dans un ouvrage dramatique les mœurs de ranli(|iiit(. et à comparer les héros qu’on met sur le théâtre avec la conduite et le caractère que les historiens leur attribuent. Je ne demande pas qu’ils fassent sur la scène ce qu’ils ont réellement foit dans leur vie ; mais je me crois en droit d’exiger (|u’ils ne fassent rien qui ne soit dans leurs mœurs : c’est là ce qu’on appelle la vérité théâtrale.

Le puhlic semhle n’aimer que les sentiments tendres et touchants, les emportements et les craintes des amantes affligées. Une femme trahie intéresse plus que la chute d’un empire. J’ai trouvé dans cette pièce des objets qui se rapprochent plus de ma manière de penser et de celle de quelques lecteurs qui, sans exclure aucun genre, aiment les peintures des grandes révolutions, ou plutôt des hommes qui les ont faites. S’il n’avait été question que des amours d’Octave et du jeune Pompée dans cette pièce, je ne l’aurais ni commentée ni imprimée. Je m’en suis servi comme d’un sujet qui m’a fourni des réflexions sur le caractère des Romains, sur ce qui intéresse l’humanité, et sur ce qu’on peut découvrir de vérités historiques.

J’aurais désiré qu’on eût commenté ainsi les tragédies de Pompée, de Sertorius, de Cinna, des Horaces, et qu’on eût démêlé ce qui appartient à la vérité, et ce qui appartient à la fahle. Il est certain, par exemple, que César ne tint à Ptolémée aucun des discours que lui prête le suhlime et inégal auteur de la Mort de Pompée^, et que Cornélie ne parla point à César comme on l’a fait parler ^ puisque Ptolémée était un enfant de douze à treize ans, et Cornélie une femme de dix-huit, qui ne vit jamais César, qui n’aborda point en Égypte, et qui ne joua aucun rôle dans les guerres civiles. Il n’y a jamais eu d’Emilie qui ait conspiré avec Cinna ; tout cela est une invention du génie du poète. La conspiration de Cinna n’est probablement qu’un sujet fahuleux de déclamation, inventé par Sénèque, comme je le dis dans mes notes ^,

De toutes les tragédies que nous avons, celle qui s’écarte le moins de la vérité historique, et qui peint le cœur le plus fidèlement, serait Britannicus, si l’intrigue n’était pas uniquement fondée sur les prétendues amours de Britannicus et de Junie, et sur la jalousie de Néron. J’espère que les éditeurs* qui ont

1. Acte III, scène ii.

2. Acte III, scène iv.

3. Voyez la première des notes sur la scène i™ de l’acte II, page 198. (B.)

4. Luneau de lioisjermain ; Tédition qu’il donna des Œuvres de Racine avec des commentaires est de 1708, en sept volumes iu-8°. (B.)