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ACTE IV, SCÈNE V. 229

SCÈNE V. JULIE, ALBINE.

JULIE.

Que veut-elle me dire, et qu’est-ce qu’on prépare ? Séjour de meurtriers, île affreuse et barbare ! Je l’avais bien prévu, tu seras mon tombeau. Albine, instruisez-moi de mon malheur nouveau : Pompée est-il connu ? Voit-il sa dernière heure ? ]\’est-il plus d’espérance ? Est-il temps que je meure ? Je suis prête, parlez.

ALBINE.

Dans cette horrible nuit, J’ignore, ainsi que vous, s’il succombe ou s’il fuit, 8i Fulvie au trépas aura pu le soustraire : Elle suit les conseils d’une aveugle colère, Qu’en ses transports soudains rien ne peut captiver ; Elle expose Pompée, au lieu de le sauver.

JULIE.

Je m’y suis attendue ; et quand ma destinée.

Dans cet orage affreux m’a près d’elle amenée,

Je ne me flattais pas d’y rencontrer un port.

Je sais que c’est ici le séjour de la mort.

Je suis perdue, Albine, et ne suis point trompée. <

La fille d’un César, la veuve d’un Pompée,

vSera digne du moins, dans ces extrémités.

Du sang qu’elle a reçu, des noms qu’elle a portés.

On ne me verra point déshonorer sa cendre

Par d’inutiles cris qu’on dédaigne d’entendre.

Rougir de lui survivre, et tromper mes douleurs

Par l’espoir incertain de trouver des vengeurs.

Pour affronter la mort, il échappe à ma vue :

Il a craint ma faiblesse ; il m’a trop mal connue :

S’il prétend que je vive, il m’outrage en effet.

Allons.