Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome6.djvu/258

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248 VARIANTES DU TRIUMVIRAT.

Une ôtoniellc horreur de nos proscriptions ; Laissons-les en tracer d’effroyables images, Et contre nos deux noms révolter les deux âges : Assassins de leur maître et de leur bienfaiteur, C’est leur indigne nom qui doit être en horreur. Ce sont les cœurs ingrats qu’il faut que l’on punisse ; Seuls ils sont criminels, et nous faisons justice. Ceux qui les ont aides, ceux qui les ont servis, Qui les ont approuvés, seront tous poursuivis. De vingt mille guerriers péris dans nos batailles. D’un œil sec et tranquille on voit les funérailles ; Sur leurs corps étendus, victimes du trépas. Nous volons, sans pâlir, à de nouveaux combats, Et de la trahison cent malheureux complices Seraient au grand César de trop chers sacrifices

OCTAVE.

Sans doute on doit punir ; mais ne comparez pas Le danger honorable et les assassinats. César est satisfait ; ce héros magnanime N’aurait jamais puni le crime par le crime. Je ne me repens point d’avoir vengé sa mort ; Mais sachez qu’à mon cœur il en coûte un effort. Je vois que trop de sang peut souiller la vengeance ; Je serais plus son fils en suivant sa clémence : Quiconque veut la gloire avec l’autorité. Ne doit verser le sang que par nécessité.

Pourquoi de Rome encor fouiller tous les asiles ? Je ne puis approuver des meurtres inutiles. C’est aux chefs, c’est aux grands, aux Brutus, aux Gâtons, Aux enfants de Pompée, à ceux des Scipions, C’est à de tels proscrits que la mort se destine. Notre sécurité dépend de leur ruine. Épargnons un ramas do citoyens sans nom. Qui seront subjugués par l’espoir du pardon : C’est leur utile sang qu’il faut que l’on ménage ; Ne forçons point le peuple à sortir d’esclavage. D’un œil d’indifférence…

Il y avait dans ce même acte une scène entre Octave et Fiilvie, qui a été retranchée.

F II L VIE.

Que le frère d’Antoine et l’amant de Julie Ne craignent point de moi des reproches honteux, Ma tranquille fierté les épargne à tous deux. Mon cœur, indifférent aux maux qui le remplissent, N’a rien à regretter dans ceux qui me trahissent. Tout ce que je prétends et d’Antoine et de vous, C’est de fuir loin d’Octave et d’un perfide époux. Ne me réduisez point à cette ignominie De parer le triomphe et le char d’Octavie ; Allez : régnf’z dans Rome, et foulez à vos pieds Dans des ruisseaux de sang les citoyens noyés. Au Capitole assis, partagez votre proie,