Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome6.djvu/575

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Le désordre est trop grand. De tout je suis instruit ;
L’intérêt de l’État m’éclaire et me conduit.
Levez-vous, écoutez mes arrêts équitables.
Pères, enfants, soldats, vous êtes tous coupables,
Dans ce jour d’attentats et de calamités,
D’avoir négligé tous d’implorer mes bontés.

CÉSÈNE

On m’a fermé l’accès.

IRADAN

Le respect et les craintes,
Seigneur, auprès de vous interdisent les plaintes.

L’EMPEREUR

Vous vous trompiez ; c’est trop vous défier de moi :
Vous avez outragé l’empereur et la loi ;
Le meurtre d’un pontife est surtout punissable.
Je sais qu’il fut cruel, injuste, inexorable :
Sa soif du sang humain ne se put assouvir ;
On devait l’accuser, j’aurais su le punir.
Sachez qu’à la loi seule appartient la vengeance :
Je vous eusse écoutés ; la voix de l’innocence
Parle à mon tribunal avec sécurité,
Et l’appui de mon trône est la seule équité.

IRADAN

Nous avons mérité, seigneur, votre colère ;
Épargnez les enfants, et punissez le père.

L’EMPEREUR

Je sais tous vos malheurs. Un vieillard dont la voix
Jusqu’au pied de mon trône a passé quelquefois,
Dont la simplicité, la candeur, m’ont dû plaire,
M’a parlé, m’a touché par un récit sincère ;
Il se fie à César ; vous deviez l’imiter.
Au vieil Arzémon.
Approchez, Arzémon ; venez vous présenter :
Dans un culte interdit par une loi sévère
Vous avez élevé la sœur avec le frère ;
C’est la première source où de tant de fureurs
Ce jour a vu puiser ce vaste amas d’horreurs :
Des prêtres, emportés par un funeste zèle,
Sur une faible enfant ont mis leur main cruelle ;
Ils auraient dû l’instruire, et non la condamner ;
Trop jaloux de leurs droits qu’ils n’ont pas su borner,
Fiers de servir le ciel, ils servaient leur vengeance.