Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome6.djvu/81

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Mais pourquoi donc lui serviez-vous de père ?
Indignement pourquoi la marier ?

DIGNANT.

J’en avais l’ordre, et j’ai dû vous prier
En sa faveur.

UN DOMESTIQUE.

En sa faveur. En ce moment Dormène
Arrive ici, tremblante, hors d’haleine,
Fondant en pleurs : elle veut vous parler.

LE MARQUIS.

Ah ! c’est à moi de l’aller consoler.


Scène V.



LE MARQUIS, DIGNANT, DORMÈNE.


LE MARQUIS, à Dormène, qui entre.

Pardonnez-moi, j’allais chez vous, madame,
Mettre à vos pieds le courroux qui m’enflamme.
Acanthe… à peine encore entré chez moi,
J’attendais peu l’honneur que je reçoi…
Une aventure assez désagréable…
Me trouble un peu… Que Gernance est coupable.

DORMÈNE.

De tous mes biens il me reste l’honneur ;
Et je ne doutais pas qu’un si grand cœur
Ne respectât le malheur qui m’opprime,
Et d’un parent ne détestât le crime.
Je ne viens point vous demander raison
De l’attentat commis dans ma maison…

LE MARQUIS.

Comment ? chez vous ?

DORMÈNE.

Comment ? chez vous ? C’est dans ma maison même,
Qu’il a conduit le triste objet qu’il aime.

LE MARQUIS.

Le traître !

DORMÈNE.

Le traître ! Il est plus criminel cent fois
Qu’il ne croit l’être… Hélas ! ma faible voix
En vous parlant expire dans ma bouche.

LE MARQUIS.

Votre douleur sensiblement me touche ;
Daignez parler, et ne redoutez rien.

DORMÈNE.

Apprenez donc…