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A L’ACADÉMIE FU AX(j AISH. 333

ol (]iu lie [Ji-élÏM-o les heureux génies de ses anciens concitoyens ; \ tout mérite étranger que pour s’envelopper dans leur gloire.

Quels éloges n’avons-nous pas prodigués aux Bacon, aux Kepler, aux Copernic, sans même y mêler d’abord aucune émulation ! Que n’avons-nous pas dit du grand flalilée, le restaurateur et la victime de la raison en Italie, ce premier maître de la philosophie, que Descartes eut le malheur de ne citer jamais !

Nous sommes tous à présent les disciples de Newton : nous le remercions d’avoir seul trouvé et prouvé le vrai système du monde, d’avoir seul enseigné au genre humain à voir la lumière ; et nous lui pardonnons d’avoir commenté les visions de Daniel et l’Apocalypse.

Nous admirons dans Locke la seule métaphysique qui ait paru dans le monde depuis que Platon la chercha, et nous n’avons rien à pardonner à Locke. N’en ferions-nous pas autant pour Shakespeare s’il avait ressuscité l’art des 8ophocles, comme M""^ iAIontague, ou son traducteur, ose le prétendre ? Ne verrions nous pas M. de Laharpe, qui combat pour le bon goût avec les armes de la raison, élever sa voix en faveur de cet homme singuher ? Que fait-il au contraire ? Il a eu la patience de prouver dans son judicieux journal, ce que tout le monde sent, que Shakespeare est un sauvage avec des étincelles de génie qui brillent dans une nuit horrible.

Que l’Angleterre se contente de ses grands hommes en tant de genres ; elle a assez de gloire : la patrie du prince Noir et de Newton peut se passer du mérite des Sophoclcs, des Zeuxis, des Phidias, des Thimothées, qui lui manquent encore.

Je finis ma carrière en souhaitant que celles de nos grands hommes en tout genre soient toujours remplies par des successeurs dignes d’eux : que les siècles à venir égalent le grand siècle de Louis XIV, et qu’ils ne dégénèrent pas en croyant le surpasser.

Je suis avec un profond respect,

Messieurs,

Voire très-humble, très-obéissant, et très-obligé serviteur et confrère, etc.