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ne société d’Athées peut subsister ; il assure que Vanini était un homme de mœurs très-réglées, & qu’il fut le martyr de son opinion philosophique. Il se trompe également sur ces deux points. Le prêtre Vanini nous apprend dans ses dialogues faits à l’imitation d’Erasme, qu’il avait eu une maîtresse nommée Isabelle. Il était libre dans ses écrits comme dans sa conduite ; mais il n’était point Athée.

Un siècle après sa mort, le sçavant La Croze, & celui qui a pris le nom de Philalète, ont voulu le justifier ; mais comme personne ne s’intéresse à la mémoire d’un malheureux Napolitain, très-mauvais auteur, presque personne ne lit ces apologies.

Le Jésuite Hardouin, plus sçavant que Garasse, & non moins téméraire, accuse d’Athéïsme, dans son livre Athei detecti, les Descartes, les Arnaulds, les Pascals, les Nicoles, les Mallebranches ; heureusement ils n’ont pas eu le sort de Vanini.

De tous ces faits, je passe à la question de morale agitée par Bayle, savoir, si une société d’Athées pourrait subsister ? Remarquons d’abord sur cet article, quelle est l’énorme contradiction des hommes dans la dispute ; ceux qui se sont élevés contre l’opinion de Bayle avec le plus d’emportement, ceux qui lui ont nié, avec le plus d’injures, la possibilité d’une société d’Athées, ont soutenu depuis avec la même intrépidité que l’Athéïsme est la religion du gouvernement de la Chine.