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Traité ſur la Tolérance. Chap. VIII.

ce Magiſtrat Romain, qu’il paraît n’avoir eu nulle conſidération pour St. Paul, n’avoir ſenti pour lui que du mépris ; trompé par les fauſſes lumières de ſa raiſon, il le prit pour un fou ; il lui dit à lui-même qu’il était en démence, Act. des Ap. Ch. 26. v. 34.multæ te litteræ ad inſaniam convertunt. Feſtus n’écouta donc que l’équité de la Loi Romaine, en donnant ſa protection à un inconnu qu’il ne pouvait eſtimer.

Voilà le St. Eſprit lui-même qui déclare que les Romains n’étaient pas perſécuteurs, & qu’ils étaient juſtes. Ce ne ſont pas les Romains qui ſe ſoulevèrent contre St. Paul, ce furent les Juifs. St. Jacques, frère de Jésus, fut lapidé par l’ordre d’un Juif Saducéen, & non d’un Romain : les Juifs ſeuls lapidèrent St. Étienne ; [1] & lorſque St. Paul gardait les manteaux des exécuteurs, certes il n’agiſſait pas en Citoyen Romain.

Les premiers Chrétiens n’avaient rien ſans doute à démêler avec les Romains ; ils n’avaient d’ennemis que les Juifs dont ils commençaient à ſe ſéparer. On

  1. Quoique les Juifs n’euſſent pas le droit du glaive depuis qu’Archelaüs avait été relégué chez les Allobroges, & que la Judée était gouvernée en Province de l’Empire ; cependant les Romains fermaient ſouvent les yeux quand les Juifs exerçaient le jugement du zèle, c’eſt-à-dire, quand, dans une émeute ſubite, ils lapidaient par zèle celui qu’ils croyaient avoir blaſphémé.