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Traité ſur la Tolérance. Chap. X.

ce, de Montauban. Nous avons pendu depuis 1745, huit perſonnages de ceux qu’on appelle Prédicants, ou Miniſtres de l’Évangile, qui n’avaient d’autre crime que d’avoir prié Dieu pour le Roi en patois, & d’avoir donné une goutte de vin & un morceau de pain levé à quelques Payſans imbécilles. On ne fait rien de cela dans Paris, où le plaiſir eſt la ſeule choſe importante, où l’on ignore tout ce qui ſe paſſe en Province & chez les Étrangers. Ces procès ſe font en une heure, & plus vite qu’on ne juge un déſerteur. Si le Roi en était inſtruit, il ferait grâce.

On ne traite ainſi les Prêtres Catholiques en aucun Pays Proteſtant. Il y a plus de cent Prêtres Catholiques en Angleterre & en Irlande, on les connaît, on les a laiſſé vivre très paiſiblement dans la dernière guerre.

Serons-nous toujours les derniers à embraſſer les opinions ſaines des autres Nations ? Elles ſe ſont corrigées ; quand nous corrigerons-nous ? Il a fallu ſoixante ans pour nous faire adopter ce que Newton avait démontré ; nous commençons à peine à oſer ſauver la vie à nos enfants par l’inoculation ; nous ne pratiquons que depuis très peu de temps les vrais principes de l’agriculture ; quand commencerons-nous à pratiquer les vrais principes de l’humanité ? & de quel front pouvons-nous reprocher aux Païens d’a-