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la légende dorée

s’en emparer : mais les soldats, s’étant approchés, le virent en prière, et n’osèrent point le toucher. Le roi en envoya deux cents autres : le trouvant en prière, ils se mirent à genoux et prièrent avec lui. Et Christophe, se relevant, leur dit : « Que voulez-vous ? » Ils lui répondirent : « C’est le roi qui nous a envoyés, pour que nous t’enchaînions et te conduisions vers lui ! » Alors Christophe : « Si je le veux, vous ne pourrez ni m’enchaîner ni me conduire nulle part. » Et les soldats : « Si tu ne veux pas venir avec nous, va-t’en librement où tu voudras, et nous dirons au roi que nous n’avons pas pu te trouver ! » Mais lui : « Pas du tout, je suis prêt à aller avec vous. » Il les convertit cependant, d’abord, à la foi du Christ ; puis il leur ordonna de lui lier les mains derrière le dos et de le conduire ainsi auprès du roi. Et le roi, en l’apercevant, eut peur et s’enfuit de son trône. Puis, reprenant courage, il l’interrogea sur son nom et sur sa patrie. Et Christophe : « Avant mon baptême je m’appelais, le Réprouvé ; maintenant je m’appelle le Porte-Christ. » Et le roi : « Tu t’es donné là un nom bien sot, le nom de ce Christ crucifié qui ne t’a servi ni ne pourra jamais te servir de rien. Pourquoi ne veux-tu pas plutôt sacrifier à nos dieux ? » Et Christophe : « Eh bien, toi, tu mérites ton nom de Dagnus, car tu es le complice du diable, et tes dieux ne sont que de vaines images ! » Et le roi : « Nourri parmi les bêtes féroces, tu ne sais dire que des choses bonnes pour elles, et incompréhensibles pour l’espèce humaine. Je te préviens seulement que, si tu consens à sacrifier à nos dieux, tu recevras de moi de grands honneurs ; mais que, si tu refuses, tu périras dans les supplices. » Et, comme le saint refusait de sacrifier, il le fit jeter en prison ; et il fit décapiter les soldats qui, envoyés vers lui, s’étaient convertis à la foi du Christ. Il fit ensuite introduire dans la cellule du prisonnier deux belles filles, nommées Nicée et Aquiline, leur promettant de grandes récompenses si elles amenaient Christophe à pécher avec elles. Mais Christophe, en les apercevant, se mit aussitôt en prière. Et comme les deux filles tournaient autour de lui pour l’embrasser,