Page:Wagner - À Mathilde Wesendonk, t1, 1905, trad. Khnopff.djvu/108

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l’œuvre d’un grand esprit les fautes et les erreurs que de donner de sa valeur un exposé clair et complet. Car les fautes sont choses particulières et déterminées, ce qui permet de les apercevoir dans leur intégralité, tandis que, au contraire, la marque distinctive que le génie imprime à son œuvre, c’est ce qui en fait l’excellence insondable, inépuisable. »

J’applique cette sentence avec la plus profonde conviction à ta dernière lettre. Ce qui me semblait erroné en elle, je l’apercevais si facilement et j’aurais pu parler de cela tout de suite après la lecture ; la profondeur, la beauté, le caractère divin de ta lettre, toutefois, est à ce point infini et inépuisable que je ne puis qu’en jouir et non pas en parler avec toi. Quelle unique et efficace consolation c’est pour moi, de te savoir si haute, si pure, il m’est impossible de te l’exprimer autrement que par tout l’effort à venir, l’effort final de ma vie. Quelle en sera l’apparence extérieure, je ne puis te le dire, il est vrai, car ceci appartient au Destin. Mais l’essence intérieure, de laquelle je tirerai les contours extérieurs de ma destinée, se condense au fond de mon être en une conscience claire et ferme, que je vais l’expliquer aussi bien que possible. —

Tu connais ma vie jusqu’au jour où je te rencontrai, jusqu’au jour où tu devins mienne. Du monde, dont l’essence était de plus en plus

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